Qui est ce mystérieux individu qui décore les murs de Paris de ses squelettes décharnés et de ses slogans teintés d’humour noir ? Mygalo 2000, ou encore MGLO comme il se fait désormais appeler, est un peintre extérieur aux multiples supports.

Un parcours évolutif
L’artiste, né en 1982 dans le sud de Paris, commence le graffiti en 1997. D’abord en s’essayant aux “intérieurs jaunes” de la ligne du RER B, le territoire urbain qui lui faisait office de toile s’est peu à peu élargi jusqu’à s’étendre aux abords des autoroutes et des tunnels.
Mes squelettes représentent les autres, les gens, le peuple, souvent des anonymes. Ma peinture n’est ni moralisatrice ni politique ni contestataire, elle est simplement populaire.
Mygalo 2000
C’est lorsqu’il se mettra à graffer des squelettes sur des camions, cette pratique étant plus communément appelée “truck graffiti“, que les œuvres éphémères de Mygalo 2000 seront davantage repérées. Son style reconnaissable se caractérise par des peintures mettant en scène des squelettes décharnés, en noir et blanc la plupart du temps -l’artiste n’utilise que peu de couleurs dans ses œuvres ; le tout agrémenté de slogans sarcastiques.
L’utilisation du monochrome dans les œuvres de Mygalo nous fait également penser au street artist Stillo Noir, dont nous avions précédemment parlé dans cet article.

Peu à peu, Mygalo s’enfonce dans les antres de Paris, dans les heures creuses de la nuit. Lorsque tout le monde sommeille et ne peut prêter grande importance à ce qu’il vient faire devant la fresque d’un bâtiment abandonné, c’est à ce moment que l’artiste intervient. Sa démarche est proche de l’instinctif et du primaire, il dit ne pas nécessairement planifier ses créations et se définit lui-même comme un “animal mécanique”. D’ailleurs, il privilégie l’appellation de peintre à celle de street artist, bien qu’il tire ses inspirations du graffiti traditionnel.


À l’image d’une araignée, l’artiste tisse sa toile à travers les rues de la banlieue parisienne et de la capitale elle-même. On peut trouver ses crânes décharnés aux quatre coins de Paris, d’autant plus grâce au support des camions, qui permettent par leur fonction première de faire voyager l’œuvre. Par la suite, c’est sur toile qu’il s’exprimera, passant ainsi à l’exposition, et enfin, à l’illustration.

UKTOEGFPKEODR et Sexypolis
Pour exposer ses toiles, Mygalo 2000 a mis en suspens son nom d’artiste et utilisé son prénom, Romain.
J’aime peindre à l’instinct. J’ai décidé d’utiliser mon Prénom (Romain) par envie d’être dans le réel. Pourquoi utiliser un pseudo et créer un double alors que ce double est très souvent plus toi que tu ne l’as jamais été.
Mygalo 2000
En 2015, c’était l’exposition UKTOEGFPKEODR qui présentait à Paris ses travaux sur des squelettes en noir et blanc, sur divers supports urbains : camions, mur, bâtiment abandonné… Le peintre s’approprie son environnement, qui constitue également la toile de son expression artistique.
En 2016, Mygalo présente Sexypolis, une exposition des fantasmes de chacun, mettant en scène des zombies bleutés et des pointes d’humour noir. Sexypolis propose une vision alternée des désirs, passant par toutes tranches d’âge, la visée de cette exposition étant de permettre d’ouvrir au dialogue quant à ces sujets parfois si tabou dans différentes sphères : le sexe et l’amour.
Ligne Claire
Adepte de tous types de supports, Mygalo a su se réinventer en même temps que sa pratique artistique. Utilisant camions, rideaux de fer, fresques de bâtiments désaffectés et passant par la toile, MGLO comme il se fait désormais appeler, a sorti en 2020 un ouvrage retraçant une majeure partie de son travail. Enrichi de photographies inédites et entrecoupé de textes personnels de ces 20 dernières années, Ligne Claire retrace le parcours de l’artiste, jusqu’à sa récente bifurcation vers l’illustration.




Oeuvres de Mygalo 2000, série “Sexypolis”





La série de Mygalo “Américan Over Looked” est une critique féroce du rêve américain et de la réalité qu’il impose. Il prend des personnages à qui il impose une vie assez minable en ajoutant le terme “American dream”. Ces œuvres-là sont engagés.
Oeuvres de Mygalo 2000, série “American Over Looked”





Oeuvres de Mygalo 2000, série “still life”



Il est donc un artiste ayant eu tout au long de sa carrière des préoccupations différentes et des styles multiculturels. Il a commencé par sa période squelettes, puis trash, et enfin dénonciatrice. On constate l’évolution de la palette graphique dans ses œuvres, Mygalo n’a pas peur des couleurs et ose toutes les formes sur quasiment tous les supports.
Mygalo est un artiste à part entière qui ressent les émotions des lieux sur lesquels il se trouve et qui aime se donner des défis et se challenger. Il est aujourd’hui une référence dans le street art, terme qui comme il le dit, n’existait même pas lorsqu’il a commencé à graffer.