Peux-tu faire une courte présentation de toi-même?
Je m’appelle Yoann BAC, j’ai 25 ans, je suis artiste. Mon travail plastique navigue entre peinture et installation multimedia. Globalement je conçois mon travail pictural comme un intermédiaire pour de la mise en scène et de l’installation plus que comme un fin en soi.
Que représente ta passion pour la peinture ? A quand remonte-elle ?
J’ai depuis mes plus lointains souvenirs toujours aimé dessiner, et ma passion pour la peinture plus précisément remonte au collège, à un âge où chacun.e souhaite, je pense, développer quelques choses de personnelle et de singulier, et mon truc a donc été de me démarquer par le dessin et la peinture. Très vite au lycée c’est devenu pour moi une nécessité, alors en parallèle de l’école j’ai appris le dessin académique, ce qui m’as permis post-bac d’intégrer une école d’art et de pouvoir m’amuser comme je l’entendais.
Quels sont tes sujets de prédilection, tes inspirations ?
Je n’ai pas réellement de sujet de prédilection. J’ai l’impression que les sujets que je peins sont la plupart des prétextes pour explorer et questionner la peinture elle-même. Mes inspirations viennent de nombreux domaines. Je m’intéresse vraiment à tout et c’est ce qui me pousse à questionner ma manière d’envisager la peinture en tant que tel. L’univers du cinéma a cependant un grand impact sur mon travail. Je suis fasciné par les techniques et les dispositifs que le cinéma met en place dans le but de créer une image. Je m’inspire bien-sur énormément de ce qui a été fait avant moi, l’idée étant de questionner et renouveler la pratique. J’aime cette citation de Duchamp pour répondre à cette question : « L’art est un jeu entre tous les Hommes de toutes les époques ».
En suivant ta pratique, on s’aperçoit qu’elle est très polarisée par des tendances, ou des détails obsessionnels produits en série, est ce que tu peux nous en parler un peu plus ? Comment s’opèrent les ruptures entre tes périodes ?
Effectivement d’un point de vue extérieur on pourrait classer mes projets comme des phases obsessionnelles. En réalité j’ai le sentiment d’avoir un sujet extrêmement vaste à explorer et je conçois chaque projet/série comme un territoire d’exploration sur une esthétique précise. Je pense que tous les artistes qui envisage de poursuivre une philosophie à travers les années procède ainsi. Et puis biensur une obsession, un projet qui plus es, en amène toujours un. C’est comme une longue marche durant laquelle on se rend parfois compte qu’il faut faire un décalage pour éviter qu’elle ne soit trop monotone (et éviter le ver des sables).
Ensuite ces envies résultes aussi des choses que je vois, que je lis, que j’étudie… C’est en vérité des long processus interne, un travail du cerveau qui n’est pas palpable, mais qui un jour doivent exister. Par exemple pour parler de mes pieds en béton, j’ai depuis longtemps eu envie de présenter mes peintures comme des affiches ou des panneaux, dans l’espace, et de leur donner une certaine autonomie de présentation. Par la suite je l’ai conceptualisé comme une volonté d’être à mi chemin entre peinture et sculpture. Et puis pour être franc j’aime beaucoup l’humour dans l’art, et c’est une volonté très forte que j’ai de le faire ressentir à travers mon travail. J’ai espoir que les gens se marrent devant mon travail, qu’ils trouvent ça drôle sans pour autant effacer la reflexion qui le constitue.
Quelle est l’importance des couleurs dans ta peinture? Faut-il y voir un message caché derrière ?
La couleur a une place importante dans mon travail. Elle est souvent la ligne directrice des séries que j’entreprend, elle draine un concept, une idée, et donne le ton. Dernièrement j’ai développé un projet intitulé « Climax of my dream » dans lequel la couleur rouge s’est imposée à moi. Ça partait du constat que la colorimétrie des films vire souvent au rouge quand l’histoire bascule et qu’on vis un changement de paradigme. C’est présent dans Shining par exemple, au moment ou la folie s’empare de Jack Torrance on a ce plan surréaliste d’un bain de sang déversé par l’ascenseur.
La couleur – au sens d’un éclairage ou d’utilisation de gélatine – est un artifice que l’on utilise au théâtre, au cinéma, parfois en architecture pour donner un ton, une ambiance.
En revanche le vert par exemple n’est pas apparu à moi pour ce qu’il renvoi symboliquement. Son utilisation était purement technique et dans un second temps le fait de l’assumer tel quel dans mes installations ou dans mes peintures affirmait mon processus en tant que tel. Montrer le vert c’était affirmer une esthétique des backstages, de ce qui n’est pas montré.
Quelques mots qui selon toi qualifieraient ta pratique ?
Décalée, Théâtrale, Post-internet et Sociale – au sens d’esthétique relationnelle.
Il y a beaucoup de visages, de silhouettes, de présence humaine dans tes peintures, qui sont-iels ?
Essentiellement des amis. Les personnes qui m’entourent, que je fais poser ou que je retrouve dans des archives photos.
Entre extérieur et intérieur, peux-tu nous parler de ton environnement de travail ?
Espace, mais aussi temps ? Quand peins-tu ? Quelle est la récurrence de ta pratique artistique ?
Je peins quasiment toujours chez moi dans mon atelier. J’ai aussi un atelier à La Défense
Je peins quasiment toujours chez moi dans mon atelier. J’ai aussi un atelier à La Défense dans la résidence Cartels. Je me suis fait la remarque récemment que les endroits où je travail influencent souvent ma peinture. Dans ma dernière série à dominante rouge il y a beaucoup de mobilier ou d’espace qui sont tirés de mon propre appartement, tandis qu’à mon atelier à La Défense j’ai entrepris d’apposer et d’intégrer des grilles d’aérations manufacturés sur mes peintures.
Quels sont les projets, expositions ou autres qui t’ont le plus marqué?
L’exposition de Philip Timilsch à la galerie High Art à Paris m’as énormément marqué dernièrement. Un grand écran led proposerais une anamorphose des murs mêmes de la galerie, et se jouait dedans des apparitions meta de ses tableaux ou de vidéos. Cette installation était à mi-chemin entre décor et vidéo. Le mur s’assumait dans son ensemble, nous pouvions le traverser et découvrir l’envers des panneaux led.
Le dispositif de plaque de verre qui supportait les peintures à l’Arsenal lors de la biennale de Venise m’as aussi énormément interpellé. Ce dispositif a des points communs avec l’installation de Philip timilsch dans le sens où elle propose au regardeur d’apprécier aussi bien la peinture que son envers.
Quels sont tes prochains projets ? Les projets phares de cette année ?
Une exposition est actuellement en préparation à la résidence Cartels que j’occupe jusqu’à novembre prochain.
Cette année pour moi l’enjeu était de rebondir sur mon diplôme de juin dernier en proposant une continuité et une certaine évolution dans ma reflexion. C’est dans cette optique que ce travail sur le rouge est apparu. En intégrant l’artefact d’une lumière artificielle dominante dans mes compositions, comme utilisé au théâtre ou au cinéma. Dans un second temps l’envie d’envisager la peinture comme un décor, un mur qui plus es, m’as amené à intégrer des objets muraux ou des ouvertures, comme des fenêtres ou bien des grilles d’aérations, et ainsi de proposer une expérience de son et lumière dans l’envers de mes peintures.
Une évolution que tu voudrais voir dans ton travail/ta pratique (projets, sujet, matériaux, ambitions ?)
Mener à bien les projets que j’entreprend. Celui avec les grilles d’aération me porte énormément en ce moment, j’ai une grande ambition concernant cette potentielle exposition et j’y travaille.
Question bonus : Y a t’il quelque chose que tu recherches à travers la peinture ?
Occupé mon temps et mon esprit. Faire vivre des expériences au gens. M’amuser.
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