DANS LES BUREAUX DE BEWARE MAGAZINE.
Fureter dans les bureaux de Beware aux alentours de Noël est déjà un cadeau en soit, pourquoi ? Pour la simple et bonne raison qu’ils sont le secret le mieux gardé depuis le trésors des Templiers (pourquoi croyez-vous que le logo soit un triangle ?). Surplombant la capitale dans un quartier reculé, obscur et mal famé, street cred’ oblige, on peut y apercevoir simultanément la Tour Eiffel, l’arc de Triomphe, Montparnasse, le lever et le coucher du soleil et même les côtes de l’Angleterre si vous plissez un peu les yeux. C’est sur cette terrasse que sont lancés les réunions de la rédaction, les plans marketing d’expositions contemporaines et autres parties de beer-pong l’été, de jacuzzis l’hiver. Oui, chez Beware on ne s’ennuie pas (trop), et il parait que Google nous envie nos courses de segway, sorte de fast and furious miniatures dans les couloirs du magazine.
L’intérieur est épuré, sans fioritures, avec des murs aux cinquante nuances de gris qui vont si bien aux années 80. L’essentiel est digitalisé, les idées cloudées, les pensées mutualisées, la culture d’entreprise virtuelle à son paroxysme qui donne le meilleur de la culture tout court, voilà le gimmick de ses dirigeants. Ainsi, aboli l’open space et ses boxes pour claustrophobes, bonjour l’ouverture des portes, fenêtres, des portes fenêtres et des relations inter-employés, toilettes unisexes comme dans Ally Mc Beal ma gueule.
Au fond de l’espace de travail, deux bureaux pour deux têtes pensantes. S’il existait une université de la teuf, Monsieur Schutz serait sans aucun doute sur-diplômé, enchainant les nuits comme d’autres les Ferrero Rocher dans un repas de famille, enclin à servir le rosé dès que l’occasion se présente : le verre d’après petit déjeuner, celui d’avant-manger, le post dessert, le pré-sieste, le goûter, la piqure de mamie, l’apéritif, le diner, le digestif, le coucher des enfants, sans oublier le pré brossage de dents et le post coïtal. Aujourd’hui, Monsieur Schutz se trouve dans un dilemme de type existentiel, et scrute les moindres centimètres de sa moustache en se demandant s’il devrait ou non la raser. En se resservant un verre.
Dans le bureau voisin, un écran géant trône sur le mur avec un auto portrait de Monsieur Manchec, hémisphère droit à la direction, exilé à Montréal pour des raisons que lui seul sait, peut être que les soirées déguisées là-bas étaient plus fun qu’ici. Mi souriant, mi sérieux avec la moitié de son visage dans l’ombre comme pour signaler que tout homme a sa part de secrets, ce portrait de Monsieur Manchec arbore une expression de mec décédé qu’on aurait essayé de commémorer avec une belle photo souvenir et des fleurs. Certains restés tard pour travailler affirment qu’à la nuit tombée, l’écran s’anime, et que monsieur Manchec parle à ceux qui veulent discuter avec lui dans une ambiance très Harry Potter.
Le premier poste que vous trouverez en sortant de ce bureau est celui de Thomas B., dont personne ne sait très bien les compétences, lui non plus. Cependant, Il n’est pas rare que Thomas B. soit pris de lubbie soudaine parmi lesquelles : bricoler son propre open space pour le rendre soundproof, orienter sa table, chaise, et fournitures de manière feng shui pendant une journée, recruter des mannequins même s’il n’y a pas de défilés, offrir des bons pour des séances de yoga dans le bar du coin, un concept qu’il a breveté. Un esprit sain dans un corps soin, une sorte de vomi zen qu’a du mal à comprendre Victoria R. sa voisine, en bouillonnement créatif constant et entassant les projets comme Thomas B. les matchs sur Tinder. Il est d’ailleurs fortement déconseillé de toucher le moindre objet trainant sur le bureau de Victoria R., potentiellement œuvre artistique en cours de fabrication ou en exposition. Chaque griffonnage sur papier, chaque marque de pied sur le bureau ou autre chewing-gum sous la table est un concept contemporain en puissance que l’UNESCO essaye en vain de classer depuis des années (l’inventaire est encore en cours).
Plus loin, un bureau immaculé où tout n’est que luxe, calme et volup…Où est Alice C. ?
” – En after.”
Celui qui vient de me répondre s’appelle Quentin D. et s’occupe des partenariats. Sans arrêt pendu au téléphone dû au nombre exponentiel de transactions commerciales entre cinq et six zéros avant la virgule. Le téléphone coincé entre son épaule et son oreille (déformation de dj), il fait tourner ses deux index en me faisant un clin d’oeil, l’air de dire « je te rejoins à la machine à café dans cinq minutes, le temps que je négocie des invitations pour une exposition post moderne dans un château d’eau en banlieue ». Quentin D. reprend sa discussion et colle un post it sur la quatrième couche de post it qui recouvre son bureau tout en mordillant ses lunettes rouges aux innombrables traces de dents. Parfois, Quentin D. regrette l’époque des Skins party et regarde son écusson dépoli siglé Ed Banger avec nostalgie, en se disant que s’il y avait un jeu concours pour un voyage dans le temps, il y participerait sans hésiter. Et mettrait à la mode les bals musette du dimanche, les Concrete sous accordéons.
Au milieu de ce fourmillement, un sapin représentant l’esprit d’entrepreneuriat de ce magazine qui a les boules mais qui ne fait pas de cadeaux, mais déjà la visite s’achève. Dans l’ascenseur plaqué or qui descend les étages comme d’autres les pintes, la playlist des cent meilleurs titres de l’année 2014 tourne en boucle. Si un jour vous faites un tour du côté de nos bureaux vous voilà prévenus, Beware n’a jamais aussi bien porté son nom.
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Illustration : Victoria Roussel : Tumblr – Facebook
PLAYLIST : 100 TRACKS FOR 2014
On a sélectionné 100 tracks qui selon nous représentent l’année 2014… on a pas voulu les classer parce que c’est impossible. Enjoy !
La playlist complète est disponible sur Spotify, elle est également disponible sur Deezer et sur Youtube mais il est possible qu’il manque des musiques en raison des droits d’auteurs non acquis par les services.
La playlist via le player Deezer :
La playlist via Youtube :