Zimmer raconte : des platines au studio

Image d'avatar de NeirdacNeirdac - Le 6 décembre 2019

Dans un troquet du 18ème arrondissement, Zimmer a donné rendez-vous à Beware, un bistrot de quartier dans lequel il semblait se sentir chez lui. Avec une conception commune du confort chaleureux qu’apporte ce genre de lieux, l’échange s’installe naturellement. Discussion autour d’une grosse planche de charcut’.

La visite guidée sera ponctuée de tracks recommandées par Zimmer himself.

Track no.1

Comment es-tu devenu Zimmer, depuis le premier chapitre ?

Je viens d’Annecy dans les Alpes, j’ai grandi là-bas, avec quelques allers-retours aux US pour le travail de mon daron. Il y avait un piano chez mes parents et j’avais envie de taper dessus. Je m’amusais à coller des couleurs sur les notes pour appréhender l’instrument.

J’ai pris une grosse claque quand j’avais 16 ans, dans un open-air en voyant un Dj attraper tout le public et je me suis dit “c’est ça que je veux faire”. Cette espèce de magie, la musique électronique qui réunit tout le monde.

Je me suis renseigné sur internet et j’ai vite chopé “Electrochoc” de Laurent Garnier à la bibliothèque : il raconte l’arrivée de la house à Manchester. Suite à ça je me suis fait tout le rayon musique électronique à la discothèque, notamment avec Vitalic, et je mixais aux anniversaires des potes, dans les soirées étudiantes, et dans les bars.

portrait photo de zimmer
Copyright Julie Michelet 2019

Et là, un producteur à la recherche de jeunes talents entre dans le bar et te laisse sa carte ?

Il n’est jamais venu ! Alors je suis allé à Paris pour étudier le design, et je me suis mis à composer en pleine période Nu Disco avec Todd Terje, Aeroplane, Breakbot, Moulinex… J’ai assez vite capté le truc et j’ai essayé de sortir des morceaux. J’ai envoyé le deuxième à mes 3 producteurs préférés : Alan Braxe, Aeroplane et Moulinex.

Deux des trois m’ont répondu et une semaine après Moulinex voulait signer un morceau. J’ai commencé à faire les warm up au Social pour des petites dates. À cette période là je suis parti quelques mois à Berlin pour faire un stage chez Native Instruments et j’étais designer pour Traktor. C’était mon rêve à la base, c’était ouf !

Donc toutes les deux semaines je faisais des allers-retours pour jouer à Paris. Ça a été une ascension assez linéaire mais avec un gap en 2015 avec quelques remixes et le premier EP chez Roche et je suis passé d’une trentaine de dates à 85 avec tournée aux US et en Asie. Je sentais la différence dans l’accueil des gens : c’est un sentiment de dingue quand t’as pas encore appuyé sur “Play” et que les gens commencent déjà à gueuler.

zimmer en plein live

Tous ces souvenirs… Y’en a-t’il un qui te marque particulièrement  ?

Ce qui m’importe plus que tout c’est cette connexion avec les gens. Tu les emmènes dans un voyage et ils te font confiance. Le dernier en date à Singapour à la fin de l’été, j’ai fait un set de 3h40 avec tout ce que j’aime dans la musique, de la disco à la techno. Le club a enregistré le set et je l’ai mis en live sur Soundcloud. Les planètes étaient alignées : l’endroit était super beau, il y avait de l’espace, la lumière était parfaite, et la foule s’est laissé emporter. C’était incroyable, j’ai des frissons rien que d’en parler.

C’est pour ça qu’on sort en vrai, pour vivre ce genre de moments, cet état de grâce où on entre dans un tunnel magique, c’est surfer une énorme vague qui ne s’arrête pas ! Tout le monde était en sueur, les gens dansaient pour de vrai, habités par la musique. Le Dj Booth était collé aux gens au 25è étage d’une tour, c’était fou. Tu tentes des enchaînements auxquels tu n’aurais pas pensé, tu ressors un vieux classique, c’est un truc de liberté quoi !

C’est comme rouler à fond sans casque dans le désert.

Zimmer, entre deux tranches de jambon, révélant son désir de permis moto

Comment se prépare-t-on pour des DJ sets aussi longs ?

Quand t’as une heure devant toi, t’as envie de bastonner direct pour accrocher tout le monde et tu calcules tout ce que tu vas faire. Quand tu as le temps, tu joues juste ce dont tu as envie, ce qui va te faire danser toi, là tout de suite. Je ne prépare pas mes sets, que ce soit pour une heure ou pour du all night long. Je ne sais jamais ce qui va se passer ! J’ai appris en jouant de longs sets dans les bars ou dans les soirées de potes, où tu joues en fonction de l’humeur des gens. Il faut être suffisamment organisé pour trouver des ambiances et des tracks facilement.

De mon côté, les connexions se font rapidement mais il y a tellement de paramètres pour sélectionner un track. Et le DJ c’est le processeur qui doit calculer tous les paramètres.

Est ce que les gens sont détente ? Est ce qu’ils sont un peu guindés ? Est ce qu’ils vont aimer la techno ? Où est-ce que tu joues ? Est ce qu’il fait suffisamment sombre ? Le sound-system est bien ? Si oui tu peux jouer des trucs plus deeps, avec de bonnes basses… Qu’est ce que le DJ avant a joué ? Si t’as un set préparé, tu peux pas réagir à ces paramètres. 

Track no.2

L’image semble être très importante pour toi. Tu as déjà travaillé avec un VJ ?

J’adore l’image, et je fais pas mal de 3D, de rendering… mais j’ai du mal avec la projection parce que je trouve que ça aplatie l’expérience. Pour moi la musique c’est un truc du moment, c’est vivant, en 3D, avoir une lumière qui passe dans la fumée, c’est un truc organique !

Dans la nouvelle scéno, j’ai de gros panneaux LED qui ressemblent à des panneaux solaires, et on les traite comme des écrans vidéo. Ça n’est pas précis d’un point de vue “pixels” mais ça permet de faire des effets de crépitement ou de balayage. Dans la fumée ça va être top.

L’univers de Roche Musique a cette patte Jazzy et un peu Hip-Hop. D’où te vient ce côté plus électronique ?

On s’est tous rencontrés il y’a déjà un moment, les membres du label ont grandi avec un son commun, qui est venu de tout ce qu’on se partageait, des tuyaux qu’on se donnait etc… C’est ça qui a créé une identité, genre 105 bpm, des accords 7ème qui donnent le côté jazzy dont tu parles, des synthés avec de gros filtres qui s’ouvrent lentement, des percussions plutôt douces…

Ça a évolué en une esthétique un peu contemplative qui est encore là aujourd’hui, et chacun a construit son truc autour de ça. Moi j’ai toujours été fan de Laurent Garnier, Vitalic, et aujourd’hui, Rone, You Man, dès le début j’étais dans ce genre de musique.

C’est aussi grâce au fait que chacun prenne son propre tournant et fasse de ce son commun un truc plus personnel que ça reste cool et que le label est une grande famille. Et on aime ce qu’on fait ! On a bien plus de chances de faire quelque chose de qualitatif si c’est quelque chose de vrai.

Track no.3

Ton album semble bien illustrer ce propos, cette mise à nu…

C’est évidemment quelque chose de très personnel : je me suis dit qu’il était temps que je fasse un album pour marquer une grande étape. Donc je suis parti de zéro, et j’ai essayé de faire plein de morceaux. Toutes les tracks de l’albums, je les ai écrites en quelques heures. Je suis beaucoup plus à l’aise avec mon processus créatif aujourd’hui donc ça peut se faire de manière instinctive et spontanée.

Si ce sur quoi je suis en train de travailler n’a pas clairement pris forme au bout de 2 ou 3 heures, y’a un souci, c’est pas quelque chose de vrai. Je reviens dessus après pour peaufiner, pendant des heures, mais la structure des morceaux est là très rapidement, ensuite, je peaufine l’arrangement et je m’occupe du mixage.

C’est un peu la pierre angulaire de ma carrière. Le point depuis lequel je peux regarder derrière moi et voir tout ce que j’ai fait depuis que j’ai commencé en tant qu’un tout. Je pense que c’est vraiment un moment charnière pour moi, e c’est aussi pour cette raison que c’est un album éponyme.

zimmer live musique

Raconte nous un raté de carrière qui t’a appris quelque chose

Le premier live de ma vie. J’avais pas suffisamment compris le concept de répet’. Quand t’es DJ pas besoin de répéter. Là c’est différent. Ce live, l’année dernière à Washington, ça se passait dans un club. J’ai eu problème technique sur problème technique. J’avais un petit contrôleur MIDI qui se déconnectait toutes les 2 secondes, les lights qui sautaient, les morceaux qui débutaient de manière trop abrupte…

Même si c’est pas la date de l’année, t’es obligé d’assumer et de continuer. Et là, c’était horrible. Le jour suivant, c’était dans une vraie salle de concert à New York pour la première fois, c’était complet ! Trop bien, 400 ticket. J’ai eu une journée pour tout refaire et tout recadrer. C’était une grosse leçon. On a voulu trop en faire en synchronisant les lights, et j’ai bien appris en ayant 10h de battement.

J’avais trop de chance, mes parents étaient venus aux US pour me conduire de salle en salle et ça me laissait le temps pour tout retravailler dans le van. Et je monte sur scène le soir sans vraiment savoir si ça allait marcher quoi.

Aujourd’hui tu es parisien, quels sont les coins de paris que tu apprécies le plus ?

J’ai un truc avec le Sacré Cœur, j’habitais pas loin avant. J’adorais aller là bas après une journée de studio, à 18h pour prendre l’air et voir la rue. J’y vais un jour sur deux quand je suis en studio c’est hyper relaxant pour moi. 

Track no.4

Qu’est-ce que tu utilises pour mixer et pour produire ?

Parlons matos, j’adore ! C’est pas original mais HD25 pour mixer. C’est le meilleur casque de DJ du monde parce qu’il est indestructible, il est fermé donc il ne laisse pas passer le son. Mais je me suis fait très mal aux oreilles en écoutant de la musique avec. Ne jamais jamais jamais faire de la prod’ avec un casque, sinon tu t’exploses l’audition. Le premier truc à faire c’est acheter une petite paire d’enceintes, y a tellement de bons trucs… J’ai acheté une paire de Adam A3X il y a 10 ans, ça coûtait 300 balles la paire. L’autre casque que j’utilise beaucoup c’est le Bose QC20. Le son est cool et c’est pratique dans le métro.

Il y a un instrument qui façonné le son de ton album ?

Ouais, c’est un instrument logiciel pour le coup mais j’ai beaucoup utilisé le Diva Hue qui reproduit les sons de grands synthés de l’histoire : MX20, Juno, Jupiter, et j’en oublie.

Tu as un Prophet sur scène je crois.

Oui, c’est plus récent, je l’ai pour le live mais il y’en a pas mal dans l’album aussi. C’est hyper versatile. Le truc cool c’est que pour une fonction tu as un bouton, donc tout est accessible sans avoir a passer par des sous menus comme sur d’autres instruments.

Track no.5

Et c’est là que les batteries de nos enregistreurs se sont avouées vaincues. Le reste on le garde pour le souvenir, et pour la prochaine fois qu’on vous parlera de Zimmer.

Écouter son dernier Album :

D’ici là on vous recommande d’aller le voir en live à la Maroquinerie le 15 février

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Neirdac
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