MADSAKI art et peinture

MADSAKI, le parcours d’un éternel étranger

Image d'avatar de Tom DemarsTom Demars - Le 21 avril 2021

Trop américain pour le Japon, trop japonais pour les États-Unis, inspiré par le street-art mais n’a jamais créé dans la rue… MADSAKI semble avoir toujours vécu en terrain étranger. Né à Osaka, au Japon, l’artiste doit, dès ses 6 ans, quitter sa terre natale pour les États-Unis. Le voilà donc arrivé dans le New York des années 80. Ce qui était, à l’époque, synonyme de vivre dans une ville en perdition et à l’infrastructure désastreuse. “Les murs de la rue étaient couverts de graffitis, et il y avait des voitures et des pneus en feu sur les routes. C’était un ghetto” se rappelle-t-il.

Pourtant, durant le trajet depuis l’aéroport, le jeune garçon va réussir à être émerveillé par l’omniprésence du street-art. Dès lors, cette cité en noir & blanc qu’était New York s’est transformée pour laisser place à une extase de couleurs. Toutes ces nuances vont constituer les premiers souvenirs d’un jeune MADSAKI ne sachant pas encore lire l’anglais. “Je ne savais pas ce que c’était à l’époque, mais en grandissant, j’ai réalisé que ça s’appelait des graffitis. Je ne le vois pas comme du vandalisme. C’est juste là, comme un arbre de la ville, et c’est beau.”

Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par l'équipe des New York Knicks des milieu des années 90.
Inspiré par l’équipe des New York Knicks du milieu des années 90.

D’immigré japonais aux États-Unis…

Alors qu’il passe son enfance dans le Queens, MADSAKI va avoir la chance de pouvoir conserver une grande proximité avec la culture de son pays d’origine. Il est, en effet, inscrit dans une école japonaise. Ce qui va, indirectement, lui permettre de découvrir l’art populaire japonais par excellence : le Manga. Car s’il “y avait des émissions de télévision japonaises tous les samedis”, c’était bien la diffusion de dramas qui dominait. La découverte de la bande dessinée et de l’animation japonaise, elle, se fera par ses amis. Ils prenaient le bus scolaire, rejoignaient les enfants qui avaient en leur possession des mangas et animés et, enfin, faisaient des échanges.

De son côté, son père, en tant que grand amateur d’art, l’amenait arpenter les nombreux musées et expositions de New York. MADSAKI a, donc, eu la chance d’être imprégné par l’art dans sa forme la plus universelle. Pour lui, faire une distinction entre un soi-disant “grand art” et un art dit “populaire” n’avait, tout simplement, pas lieu d’être.
En découle une adolescence marquée par la découverte de ces univers, puis des études supérieures conclut par un diplôme de la Parsons School of Design de New York en 1996.
Seulement, cette période va aussi voir naître le premier défi de la carrière MADSAKI. En effet, à la suite de l’obtention de son diplôme, l’artiste d’origine nippone peint, sans faute, tous les jours “des compositions géométriques avec de l’acrylique ou de la gouache, et des pinceaux”. La répétition quotidienne de ce procédé va, petit à petit, devenir une corvée. Et alors que sa carrière débute à peine, MADSAKI commence déjà à se lasser. “Ce n’était pas moi et je ne pouvais plus le faire…” Mais c’est aussi à cette époque que va arriver le prochain grand changement de sa vie : son retour forcé au Japon.

Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par la sitcom culte Le Prince de Bel-Air.
Inspiré par la sitcom Le Prince de Bel-Air.
Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par les œuvres de l'artiste new yorkais Andy Warhol.
Inspiré par les œuvres de l’artiste new yorkais Andy Warhol.

… à américain vivant au Japon

Tokyo. 2004. N’ayant pas obtenu de visa américain, ni de carte verte, MADSAKI doit finalement retourner sur l’archipel nippone. L’acclimatation va être difficile pour l’artiste. S’être construit aux États-Unis, conjugué au fait, qu’à l’époque, très peu de japonais parlent réellement anglais, vont créer chez MADSAKI un sentiment d’isolement. “Personne ne comprenait l’anglais au Japon, alors je me parlais à moi-même tout au long de la journée.” Il décide, alors, d’écrire ce qu’il marmonnait à longueur de journée à la manière d’un dialogue. Cette expérience va, finalement, le faire renouer avec la démarche artistique. S’il n’ose pas reprendre la peinture, MADSAKI a bien retrouvé un moyen de créer.

Mais pour en arriver là, l’artiste a déjà dû réapprendre à aimer peindre. Un processus qui fut long (sa première série, intitulée Wannabe, sera exposée 11 ans plus tard) et laborieux. MADSAKI a, pour cela, une méthode unique : se réincarner en peintre célèbre. “En regardant des dessins animés et en parcourant des musées, j’ai compris que je voulais faire des œuvres d’art célèbres. Je voulais devenir un artiste célèbre, mais je n’étais qu’un artiste affamé. Alors, j’ai pensé, faisons comme si j’étais le type célèbre. Soyons Vincent van Gogh, soyons Claude Monet.” Ce qui était au départ une sorte de blague va se dévoiler être réellement thérapeutique. “Je me disais que si je devenais Monet, je pourrais peut-être apprécier à nouveau le processus de peinture. Au fur et à mesure que je l’ai fait, j’ai commencé à sentir que la peinture était amusante.” explique-t-il ainsi.

Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par le peintre français Jean Auguste Dominique Ingres.
Inspiré par le peintre français Jean Auguste Dominique Ingres.
Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par Le Cri d'Edvard Munch.
Inspiré par Le Cri d’Edvard Munch.

Cette méthode va, finalement, devenir le style à part entière de MADSAKI. Aujourd’hui reconnu pour ses toiles qui détournent les œuvres de grands maîtres ou des scènes de la pop culture, l’artiste a réussi à tirer le maximum de son expérience. Ses origines japonaises, son arrivée à New York, sa découverte du street-art et de la culture nippone, sa perte d’attrait pour la peinture, son œuvre est totalement habité par des fragments de sa mémoire. MADSAKI est son œuvre. Ses toiles peintes à la bombe aérosol, au format historique et aux figures identifiables, sont maintenant reconnues à l’échelle internationale.
Mais ce qui fait réellement le charme de son art est son détournement de la figure du smiley. L’écrasante majorité de ses protagonistes sont, ainsi, affublés d’un visage épuré, avec seulement trois traits qui forment un sourire. Cette spécificité en est même devenue, au vu de son importance, la partie la plus angoissante de son processus de création : “tout le monde pense que c’est facile, mais c’est tellement dur. Quand j’ai commencé, j’ai dû le refaire plusieurs fois. Un petit détail peut tout changer…”

Plus qu’un simple trait physique, ce sourire est la partie la plus émotionnelle de la toile. Malgré son aspect simpliste, il symbolise réellement l’âme du tableau. Comme lorsqu’il est devenu artiste, MADSAKI accorde une importance primordiale à sa psyché. Et alors qu’il est, aujourd’hui, un homme accompli et un artiste adoubé par les plus grands artistes contemporains (Takashi Murakami en tête), MADSAKI garde cette innocence, cette peur presque enfantine de ses débuts. L’art est ce qui le fait vibrer, ce qui la fait rire, mais représente aussi une thérapie. “Si je le foire [le sourire], c’est toute la composition qui est foutue. Il y a des jours où je ne peux tout simplement pas le faire. Certains jours, je ne le sens pas, alors je laisse le visage et je rentre chez moi. Le lendemain, si je me sens bien, je le fais.”

Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par le film de In the Mood for Love de Wong Kar-Wai.
Inspiré par le film In the Mood for Love de Wong Kar-Wai.
création smiley
peinture à l'aerosol
Toile réalisée par MADSAKI et inspirée par une célèbre photo de Mohammed Ali durant un combat.
Inspiré par une célèbre photo de Mohammed Ali durant un combat.
Femme qui se maquille dans la glace par le peintreMADSAKI

Retrouvez le travail de MADSAKI sur son compte Instagram et découvrez les 3 NFT mis en vente par la célèbre galerie parisienne Kamel Mennour.

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Tom Demars
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