Interview : Tanc VAO

Image d'avatar de NoddNodd - Le 28 mai 2013

Tanc Graffuturism 2

Comme promis, nous posons notre regard sur un deuxième artiste, Tanc VAO, toujours à l’occasion de l’expo collective de Graffuturism Paris.

Cet artiste fait aussi parti de la vague international Graffuturism, un mouvement artistique créé par l’artiste américain Poesia en 2010, le site éponyme (graffuturism.com) avait pour objectif à l’origine de mettre en avant des artistes partageant la même vision du graffiti, que ce soit dans la pratique que dans son évolution. Les notions de vitesse, de ligne, d’abstraction, de point de fuite et de géométrie en sont les axes principaux, bien que la figuration y ait également sa place.

BM : Peux tu te présenter et me parler de tes activités artistiques? 

T : Alors, je m’appelle Tanc, diminutif de mon prénom Tancrède,  je suis artiste peintre et en même temps je compose de la musique électronique. Je navigue entre les deux disciplines et chacune m’inspire pour l’autre.

BM : Comment es tu tombé dans la marmite artistique?

T : J’ai toujours dessiné, peinturluré et puis j’ai découvert le Graffiti dans les débuts 90. J’ai commencé par dessiner sur papier et mon premier mur peint a été seulement en 96. J’ai eu une bonne période de gestation car je ne ressentais pas le besoin immédiat de peindre sur ce support malgré que je fasse quelques tags avec mon marqueur comme tout le monde le faisait dans les lycées de l’époque.

Je n’avais pas l’impression des différents des autres jeunes alors j’ai commencé à acheter des bombes et bizarrement ma première peinture était abstraite. En testant les caps, les formes, les couleurs, je me suis rendu compte qu’il y avait un truc incroyable avec la bombe de peinture, du fait que l’on ne touche pas le support. Le pouvoir de projeter et de passer d’un mur à un autre, de passer des éléments comme des tuyaux, j’ai vraiment trouvé ça jouissif et depuis je n’ai jamais cessé le Graffiti.

BM : C’est inhabituel de commencer le Graffiti par de l’abstrait, pourquoi avoir débuté par ce style plutôt qu’un autre? 

T : J’avais déjà une culture liée à des livres et des magazines américains de la première heure que je lisais donc j’ai pu découvrir en amont des pièces abstraites avec des artistes comme Futura 2000 en autres. J’ai appris aussi que beaucoup étaient ensuite passés sur des toiles, ce qui me donnait une image plus générale de peinture avant tout que de Graffiti. Peindre dans la rue pour moi, c’était peindre tout simplement sur grand format. Par la suite, j’ai vite commencé à peindre des lettres car l’impact est incroyable, on retient ton nom et tu deviens connu, ce qui te pousse à continuer!

BM : Quel a été ton déclic pour passer de la rue à l’atelier? 

T : Après cette période, j’ai commencé à peindre des affiches grâce à Jean Faucheur et ce passage en atelier m’a fait prendre conscience qu’il fallait faire plus que des lettres et ce que je faisais dans la rue. Dans les années 80, je savais que beaucoup d’artistes de rue avaient travaillé sur des toiles et je ne voulais surtout pas réaliser des copies de ce qui avait peut être déjà été fait 20 ans après, ça allait être ridicule.

BM : Peux tu me parler de tes débuts dans la recherche en atelier?

T : J’ai débuté une recherche picturale sur le trait et autour des énergies pour essayer de capter le moment présente, de jouer avec les outils et de tester des techniques. En général, on procède en réalisant un fond et puis en posant son nom dessus mais très vite mon nom est passé derrière le fond et à partir de ce moment là, il n’y a plus de limite!

C’est un travail sur le trait et comme je te disais, cet aller-retour avec la musique électronique m’a fait prendre conscience que la musique était représentée par des lignes, des oscillations, des courbes et des segmentations. J’ai commencé à faire des recherches sur ce point qui était finalement représentatif de mon émotion, des pulsations du cœur car si tu l’écoutes c’est une image d’électrocardiogramme ce qui revient à la même que la musique. Mon travail consiste à peindre ma musique intérieur, capter l’énergie et l’instant du moment.

J’ai conservé les médiums comme la bombes, les encres utilisées dans la rue parce que je me sentais à l’aise avec ça et je voulais préserver la distance avec le support car même les encres étaient projetées sur la toile. J’étais attaché à ces outils que j’aimais car ça me permettait de rester dans le mouvement du Graffiti et fidèle à mon parcours. Ce point était important car les premières galeries où j’ai exposé dans les années 2000 m’ont proposées de travailler avec elles car j’étais Tanc dans la rue, je n’ai jamais utiliser un autre nom que mon pseudo à ce moment là.

Je ne voulais pas tirer un trait sur tout ça, j’ai toujours continué à peindre dans la rue en parallèle de mon travail en atelier pour dire que certes je faisais des toiles pour les galeries mais je cautionne toujours le Graffiti, j’aime ça et je continue à être acteur de ce mouvement. Je voulais faire passer un message aux jeunes en leur montrant que je pouvais vendre des toiles et m’exposer à des risques comme eux en faisant des tags.

BM :  C’était plus facile pour toi de présenter ton travail proche du Graffiti dans les années 2000 plutôt que dans les années 90 où la scène était vraiment plus hardcore? 

T : Ça c’est clair que c’était plus facile! Il y a eu l’arrivé du street art et le graffiti était beaucoup mieux perçu, ça commençait à devenir hype et fashion avec des gars comme Zeus et André. C’était vraiment une période transitoire car milieu 90 , les rues de Paris étaient cartonnées par beaucoup de monde, il y avait une grosse scène graffiti, c’était l’âge d’or.

Puis courant 2000, les murs de la ville ont été nettoyés, il y eu de gros procès contre des groupes de tagueurs ce qui a calmé les hardeurs de beaucoup de personnes dans le milieu mais au final Paris était vierge. C’est à ce moment là que je suis ressorti dans la rue faire des tags au fat cap avec Sunset, Babou, Atlas et comme nous faisions des expos parallèlement, on a bénéficié d’un certain buzz. Il était plus simple de se faire remarquer lorsque les murs étaient propres, que les places étaient libres et on en a profité.

BM : Comment procèdes tu habituellement quand tu peins dans la rue?

T : Tout d’abord, je peins essentiellement le matin, j’essai d’être bien habillé et je privilégie la mallette au sac à dos.

La méthode est différente de mes débuts car la confiance en soi n’est plus du tout la même et quand tu peins, les gens ressentent ton assurance et ne se demandent pas ce que tu est en train de faire. Par exemple, quand j’étais en Corée, des voitures de police passaient près de moi et ne s’arrêtaient même pas. Je suis arrivé à un stade où je peins vraiment sérieusement et le fait de m’exposer à une répression sévère dans certains pays ne m’arrête pas.

Je peins très rapidement, ce qui me permet de rester dans le flux de la ville.

C’est des sensations très fortes que je pourrai comparer à un braquage de banque.

BM : Tu t’intéresses à ce qu’il se fait dans le milieu?

T : Je regarde énormément ce qu’il se fait dans la rue car j’aime beaucoup ça. Les PAL sont très présents dans les rues de Paris et font vraiment avancer le mouvement graffiti avec un style à part, une ouverture sur l’illustration et une liberté.

BM : Peux tu me parler de ton actualité?

T : J’ai été peindre en live et fait des expos en Corée, à Singapour, l’île de la Réunion, au Liban ainsi qu’au Maroc.

En ce moment, je suis sur Paris dans le cadre de l’exposition collective Graffuturism qui vient de se terminer pour ma part.

Coté musique, je prépare des événements pour cet été en Corse, avec des danseuses et des performances en direct.

BM : Des dédicaces? 

T : Les VAO, vous êtes les plus forts!

Merci Tanc pour cet interview.

La première exposition solo du cycle Graffuturism avec Augustine Kofie “California Soul” débute du 25 mai au 5 juin à la Galerie Openspace, 56, rue Alexandre Dumas, Paris, FR.

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Nodd
Article écrit par :
Rédacteur pour Beware Magazine, j'aime tout ce qui touche de près ou de loin à la street culture.

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