impression 3d dans la mode

Impression 3D : la promesse d’une mode plus durable ?

Image d'avatar de Damien LatifiDamien Latifi - Le 24 octobre 2021

L’usage de l’impression 3D ne cesse d’ouvrir de nouvelles possibilités pour l’une des industries les plus polluantes dans le monde.

Impression 3D : la promesse d'une mode plus durable ?
©Atomstack

De sa création de la première imprimante 3D, en 1991, à sa version pour les particuliers en 2009, cet outil semble avoir trouvé sa place dans une industrie où le fait-main a toujours eu une place de choix.

Une petite révolution

Il semble que l’impression 3D, en industrie comme à la maison, tende à s’étendre et à révolutionner nos modes de production. Aujourd’hui il est possible d’imprimer à partir d’un modèle sur internet des objets designs, des accessoires et des vêtements via des sites tels que Cults3D ou Youmagine. Ceux-ci permettent, entre autres, aux utilisateurs de télécharger des fichiers déjà formatés pour l’impression en 3D.

Les particuliers peuvent donc recréer une pièce matérielle à la maison, à partir de designs informatiques. C’est une révolution, car il n’y a plus nécessairement besoin de passer par des intermédiaires ou par un processus de fabrication particulièrement long. Cela permet, désormais, de créer des objets en quelques heures, chez soi, grâce à des fichiers téléchargeables en STL, l’équivalent du PDF pour l’impression 3D.

Pour permettre aux particuliers toujours plus d’autonomie et de créativité, la marque Atomstack a dévoilé l’imprimante 3D Cambrian, au début de l’année 2021. Cette imprimante est la première sur le marché qui permette d’imprimer chez soi des paires de chaussures en façonnant le caoutchouc.

L’imprimante 3D Cambrian par Atomstack

L’imprimante aux multiples facettes

Il est non seulement possible d’imprimer des pièces à la maison, mais la création est également rendue plus accessible par l’usage de logiciels qui donnent vie à des designs personnels. Avec Fusion 360, Rhinoceros ou encore l’incontournable Sketchup, la modélisation des créations et le transfert sur des logiciels adaptés à l’imprimante suffisent pour la voir chauffer sa buse et fondre le filament.

D’autres imprimantes, comme la machine Kniterate, n’utilisent pas de filaments qui sont fondus, mais des pelotes de laine ou de coton. Créée en 2017, cette machine à tricoter permet de reproduire des modèles réalisés sur Illustrator ou Photoshop et d’imprimer des pièces textiles sans avoir besoin de les découper. 

Une imprimante 3D avec des bobines de fils de six couleurs différentes.
Kinterate : ​​La machine à tricoter digitale. ©Kniterate

L’’impression 3D : tout un art

Grâce à la digitalisation de la vie en général et au nouveau rapport que les consommateurs entretiennent avec la technologie, l’imprimante 3D réussit doucement à se faire une place au sein des habitudes des particuliers. Mais elle s’intègre également aux habitudes de l’industrie de la mode, notamment celle de la haute couture, en permettant de créer des pièces de plus en plus originales. 

Cette originalité, elle le doit aux matières et aux designs qu’elle peut produire. À la fois extrêmement précise et rapide, l’imprimante 3D permet de travailler avec plus de facilité des matières telles que l’argent, le nylon, l’acier. Elle rend alors possible une expérimentation plus poussée et des designs plus complexes. 

 

Une tenue composée d'une robe et de branchies imprimées en 3D.
Met Gala 2021, Grimes portant du  Iris van Herpen @IrisvanHerpen

Il y a donc un passage du dessin sur papier au dessin sur ordinateur, de l’aiguille aux buses similaires à celles utilisées par les tatoueurs. Pourtant, ce passage n’est pas une rupture entre deux mondes : elle ne représente pas l’abandon d’un savoir-faire, mais plutôt une nouvelle méthode qui permet d’allier le savoir-faire des artisans et les nouvelles technologies.

L’enjeu écologique

D’après le rapport sur l’industrie de l’habillement et du textile de WWF, l’industrie de la mode contribue au réchauffement climatique à hauteur de 1,7 milliards de tonnes de CO2 par an. Face au réchauffement climatique et son impact plus que jamais grandissant, les industries, et notamment celles du textile, ne peuvent plus rester les bras croisés.

Un des moyens d’agir serait notamment de réduire le nombre d’invendus, et donc le gaspillage. Cela peut se faire en passant par l’éco-conception et le recyclage. Ou encore, lupcycling peut être une solution, en réutilisant des matières déjà existantes pour de nouveaux produits sans exiger le passage par un long processus de transformation.

Il est enfin possible de changer nos modes de production, partant de la transformation des fibres par des procédés chimiques et mécaniques jusqu’à l’assemblage et l’importation.

Un tas de vêtements colorés dans un entrepôt.
Photo © François Le Nguyen (unsplash)

La promesse de l’impression 3D

L’impression 3D offre cette promesse d’une mode plus durable par des modes de production responsables. Elle permettrait donc à l’industrie de diminuer son impact environnemental. Via l’impression 3D, elle pourrait, par exemple, mieux répondre à la demande des consommateurs en permettant de rendre plus rapide la création des vêtement, évitant alors les longs procédés d’une fabrication traditionnelle.

Elle peut aussi rendre accessible des modèles en rupture de stock, en les créant rapidement à la pièce, et donc offre l’avantage d’une fabrication sur demande. Cela réduirait les émissions dues aux invendus puisque les marques auraient besoin de garantir moins de stock au préalable. 

Mieux encore, elle permettrait l’utilisation à grande échelle de nouveaux matériaux réutilisables comme les thermoplastiques, des matières plastiques qui se transforment sous l’effet de la chaleur sans réaction chimique. L’impression 3D, pourrait donc changer nos modes de productions, réduire le gaspillage et répandre l’utilisation des matériaux recyclables et recyclés. 

Entre design et écologie

Cherchant à créer des collections plus durables et en phase avec un monde qui se digitalise, certaines créatrices comme Julia Daviy ont effectué un tournant impressionnant. Depuis 2018, elle tente de prouver la durabilité des matières utilisées grâce à l’impression 3D, rendant possible des designs avant-gardistes tout en s’inscrivant dans une démarche responsable.

Une femme portant un sac noir et gris soutenu sur son épaule par une chaîne en impression 3D.
Pandora Bag, @Juliadaviy

La production du sac de Julia Daviy, ici en nylon, cause 92 % à 99 % de déchets en moins que les modèles actuellement le marché, grâce à son impression 3D. Une réduction notable des émissions de carbone et des besoins qui représente alors un monde de promesse.

Une production à grande échelle ?

D’autres, comme Nike et sa capsule 100% végane de 2021, essaient de s’aligner avec un monde qui se veut plus écologique. La marque à la virgule est en passe de généraliser l’utilisation de l’impression 3D, en tentant de rendre possible ce qui était encore impensable il y a plus de 20 ans. Elle innove avec l’intégration en 2018 d’une empeigne textile imprimée en 3D, qui couvre la partie supérieure de ces chaussures.

Une chaussure de sport Nike zoom vaporfly elite flyprint ©Nike
Nike zoom vaporfly elite flyprint ©Nike

La fast-fashion, tout le marché de la mode rapide à moindre coût, particulièrement pointée du doigt pour son impact écologique et sociologique, tente également de rentrer dans cette nouvelle ère. Mango, marque du géant Inditex à qui on doit également Zara, a présenté en avril 2021 sa “Collection 3D” d’accessoire. Elle collabore alors avec Comme Des Machines, un expert en mode durable et en impression 3D. Connu aussi pour son travail avec Nike ou Reebok, il matérialise régulièrement les engagements écologiques des géants de l’industrie du textile.

Une femme avec un sac en toile de couleur beige pâle et transparent, avec des motifs en 3D représentant des fleurs bleues.
    Mango, Collection 3D,  Organza flowers bag SS21, fleurs imprimées en 3D @Mango

Malgré tout, l’utilisation de ces nouvelles technologies reste assez marginale chez les marques au fort impact carbone. Néanmoins, elles semblent tout de même changer incontestablement les habitudes d’une des industries les plus polluantes, lui permettant de s’engager dans une mode plus durable.

Si l’utilisation de ces nouvelles technologies reste très limitée, c’est à cause de la complexité des logiciels, mais surtout du coût de fabrication de pièces à grande échelle. Celui-ci n’est pas jugé assez rentable, car il n’y pas d’économie d’échelle, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de baisse du prix de production selon la quantité.

Une digitalisation des savoirs-faire

Si la reconnue Iris van Herpen a réussi à créer des collections en impression 3D, il semblerait que le reste de l’industrie s’y lance doucement. Daniel Grieder, ancien PDG de Tommy Hilfiger et nouveau PDG d’Hugo Boss, s’est exprimé sur les possibilités de la 3D dans une interview pour Vogue Business podcast en mai 2020. Pour lui, le design 3D, entend révolutionner le marché en rendant 100 % digitales ses collections d’ici le printemps 2022.

C’est une nouvelle manière de travailler […] plus rapide, plus efficace, et plus durable. [C’est aussi ] la réelle possibilité […] d’éviter la fabrication inutile de prototypes. 

Daniel Grieder

Il évoque ici les bienfaits du design 3D, permettant de créer les prototypes des modèles sans avoir besoin de les fabriquer, ce qui rend la modélisation du produit beaucoup plus simple et permet une réelle visualisation. C’est pour lui : « Une nouvelle manière de travailler […] plus rapide, plus efficace, et plus durable. »

Tommy Hilfiger s’est particulièrement lancé dans le digital, notamment avec son showroom entièrement digitalisé. Il semble tout de même que la marque ne soit pas encore prête à faire entièrement le pas vers l’impression 3D. Pourtant, Daniel Grieder reconnaît que l’enjeu derrière est bien plus celui de la rapidité à laquelle les designers peuvent modéliser leur produit, c’est « la réelle possibilité de montrer ce qu’ils ont en tête, et d’éviter la fabrication inutile de prototypes ».

Si l’utilisation de l’impression 3D à grande échelle ne semble pas encore devenir la norme, c’est tout d’abord le début d’une réelle digitalisation des savoir-faire. C’est aussi, et surtout, une vraie porte ouverte à l’utilisation des nouvelles technologies au sein de l’industrie du textile en réponse aux enjeux climatiques.

Suivez l’actualité des technologies 3D et de l’impression, en consultant 3Dnatives ou Les Imprimantes 3D, qui postent régulièrement sur le sujet !

Partagez avec vos amis :)
Tags en rapport :
A voir aussi !
Metronomy dévoile son nouveau clip With Balance

Metronomy dévoile son nouveau clip With Balance

En collaboration avec Naima Bock et Joshua Idehen, le clip…

24 avril 2024

Hermes Volker : l’artiste qui met un masque aux classiques

Hermes Volker : l’artiste qui met un masque aux classiques

Hermes Volker s'est fait connaître pendant la pandémie avec des…

24 avril 2024

La petite histoire du graffiti

La petite histoire du graffiti

Élément originel et central du street art, vous avez sans…

23 avril 2024

Damien Latifi
Article écrit par :

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.