David Mcmillan a photographié les ruines de Tchernobyl à plusieurs reprises. Après l’accident de 1986 à la centrale nucléaire de Tchernobyl, 135 000 personnes ont été évacuées d’une zone s’étendant sur 30 kilomètres autour du réacteur endommagé. Il a tout d’abord photographié Tchernobyl en 1994 et même si la zone dite d’exclusion était étroitement surveillée, Mcmillan a été autorisée à voyager et à photographier librement. Le photographe a vite réalisé que le sujet était vaste et complexe, ce qui l’a fait revenir fréquemment.
La ville de Pripyat, où la plupart de ces photographies ont été prises, abritait les employés de la centrale nucléaire et leurs familles. Connue comme la ville atomique, Pripyat était considérée comme l’un des meilleurs endroits où vivre dans l’ancienne Union soviétique. Les premiers appartements ont été construits au milieu des années 70, alors que la centrale électrique était encore en construction. Il y avait toutes les commodités d’une ville soviétique moderne, avec de nombreuses écoles, magasins, hôpitaux et installations récréatives et culturelles. Au moment de l’accident, Pripyat abritait 45 000 personnes mais elle ne sera plus jamais habitée.
“Je n’avais jamais eu l’intention de re-photographier ces lieux au fil du temps. Dans certains cas, les changements avaient transformé un lieu si substantiellement que je ne l’ai pas reconnu comme un endroit que j’avais photographié auparavant. Les bâtiments s’effondrent et la végétation prolifère. À un certain point, la distinction entre l’intérieur et l’extérieur sera effacée, ramenant la ville connue sous le nom de Pripyat à un paysage naturel avec seulement des vestiges de la vie qu’elle avait autrefois hébergée”
David Mcmillan.
David Mcmillan a visité Tchernobyl pendant vingt-cinq ans et a visité le site vingt-deux fois. Ces explorations ont fait l’objet d’un album photographique intitulé Growth and Decay: Pripyat and the Chernobyl Exclusion Zone, publié cette année par Steidl. S’il avait déjà effectué un voyage à la frontière de la zone d’exclusion, c’est en 1994, qu’il tombe sur un reportage de Harper’s Magazine : “Périple en terre condamnée : dans les ruines encore létales de Tchernobyl”, réalisé par Alain Weisman. Les récits et images du reportage poussent David McMillan, déjà bien avancé dans sa carrière (il a alors presque 50 ans), à se rendre directement à Tchernobyl.
Ses photographies, acquises par le Musée des Beaux-arts du Canada en 2013 donnent à voir des images terribles d’une ville à l’abandon, quittée dans la précipitation et la peur. Au fur et à mesure de ses voyages, la nature reprend ses droits sur l’espace urbain et vient apaiser le sentiment terrible qu’inspire l’incident de Tchernobyl.
David Mcmillan est autant influencé par le pop art de James Rosenquist que les expérimentations cinématographiques de Sergueï Eisenstein. Les photographies prises à Tchernobyl sont autant un travail documentaire que plastique. L’urbex se met au service de l’esthétique. Mcmillan attache une attention toute particulière aux couleurs et aux symétries accidentelles qu’il rencontre. Avec lui, nous comprenons que Tchernobyl n’est pas un endroit figé puisque rien ne peut arrêter la nature, la dégradation, le temps. La fragilité du monde humain est contrebalancé par la vigueur de la faune et de la flore alentour.
Si vous avez été touché par la série du photographe David Mcmillan, nul doute que l’ouvrage Naturalia de Jonk saura également vous transporter.