Guy Billout, l’illustrateur amoureux de l’absurde

Image d'avatar de Thomas DagnasThomas Dagnas - Le 19 mars 2024

Depuis le début des années 1960, le dessinateur français Guy Billout peint sa vision du monde, empreinte d’esthétisme et d’une grande dose d’humour.

Œuvre de Billout où on voit une voiture jaune s'envoler à cause de la force du vent ainsi que les fenêtres d'un bâtiment prendre leur envol

Comment réussir à mêler la beauté et le message ? C’est le défi que s’est lancé l’illustrateur né à Decize pendant la Seconde Guerre Mondiale. À travers ses œuvres, Billout réussit à attraper l’œil fasciné du spectateur ainsi que sa curiosité. Le peintre français possède un style très particulier. Inspiré par l’esthétique pop des années 80, il trace des lignes très droites, crée des tableaux très épurés où les toiles de fond sont très souvent des villes modernes voire aux allures futuristes. Inspiré tout autant par la créativité de l’architecture que par la pureté de la nature, il jongle entre ces environnements et y intègre sa patte.

Un grand nom du design américain en guise de parrain

Après un début de cursus axé sur le monde de la publicité, où Guy Billout suit une formation sur l’art de la publicité à l’école des Arts appliqués de Beaune et obtient par la suite des emplois au sein des agences Publicis et Thibaud-Lintas, le créatif français veut changer d’air. Revirement total de parcours puisqu’il s’envole vers New York pour faire de sa passion qui est l’illustration, le point central de sa vie.

Œuvre de Billout où on voit un homme au bord d'un plongeoir d'une piscine qui offre la possibilité de sauter à droite ou à gauche

Avec une grande audace et une détermination hors pair, Guy Billout toque aux portes des plus grands noms du design américain. Une en particulier va s’ouvrir devant lui. C’est celle de Milton Glazer. Célèbre graphiste et typographe, il a forgé la culture populaire américaine d’après guerre et c’est notamment à lui que l’on doit l’emblématique logo “I ❤ NY“. En 1969, il est directeur graphique du New York Magazine lorsque le jeune français vient lui proposer une série d’illustrations évoquant l’admiration d’un jeune artiste pour l’Amerique. Bingo, le maestro est séduit et accepte de publier tous les dessins de Billout dans son magazine.

Œuvre de la collection "J'arrive à New York", publiée dans le New York Magazine. On voit une femme présente en haut de la flamme de la statue de la liberté, regarder la statue de la liberté.
Œuvre de la collection “J’arrive à New York”, publiée dans le New York Magazine

Des œuvres empreintes d’ironie

Une fois remarqué par l’un des pontes du design américain, Billout peut continuer sa route et perfectionner son art. Il se dirige petit à petit vers un style épuré, qui joue beaucoup sur la transformation des perspectives, et s’inspire par exemple des estampes japonaises pour donner à ses tableaux une clarté et une pureté véritable.

Billout choisit alors de ne pas se cantonner à la réalisation de belles œuvres, mais d’y intégrer des éléments surréalistes qui en deviennent sincèrement drôles. Dans une interview donnée en 2019 au magazine Les Arts dessinés, Guy Billout explique : « Le goût de la galéjade est peut-être un moyen d’apaiser ma tendance à redouter le pire. ». On comprend alors que l’artiste s’échappe de la réalité et des peurs de la vie en intégrant des modifications surréalistes à ses dessins. Pourtant, il la chérit cette vie et surtout son réalisme. Il poursuit : « Pour que la « blague » fonctionne, il me faut partir d’une situation réelle, qui doit être exactement reproduite ». Cet équilibre parfait entre absurde et réalité est la pierre angulaire des situations décrites par ses dessins.

Œuvre de Billout où on voit un homme de ménage soulever la Tour de Pise pour aspirer en dessous

Ainsi, il nous met devant un temple grec qui ne tient miraculeusement que grâce à une unique poutre, il dessine un ouvrier en train de peindre le reflet d’un immense paquebot dans l’océan. Il fait aussi dérailler un train, qui semble apeuré par la présence d’un serpent sur la voie.

Œuvre de Billout où on voit un guide touristique faire une visite à un couple dans un temple grec à une seule colonne
Œuvre de Billout où on voit un artisan repeindre la mer devant un paquebot
Œuvre de Billout où on voit un train dérailler à cause de la présence d'un serpent sur la voie

Ces nombreuses situations en deviennent drôles par leur absurdité. De plus, étant donné que Guy Billout s’efforce de mettre ces éléments incongrus dans des environnements communs, qui parlent à tout le monde, ça rend le contraste plus facilement acceptable.

Le succès international de Guy Billout

Entre 1970 et 1990, Guy Billout continue à publier ses dessins dans de grands journaux et magazines nord-américains comme le New York Times ou encore Life, mais c’est son parcours chez The Atlantic Monthly qui le propulse sur le toit du graphisme mondial.

Couverture du magazine "The Atlantic Monthly" réalisée par Guy Billout
Couverture du magazine “The Atlantic Monthly” réalisée par Guy Billout
Œuvre de Billout où on voit des passants observer le vide alors même qu'il y a la mer de l'autre côté

Pendant 24 ans, l’artiste français forge sa légende en publiant dans le magazine ses dessins qui s’apparentent parfois à une nouvelle forme de caricature. Son dévouement pour son art n’est pas sans récompense puisqu’il obtient en 1989 le titre Hamilton King Award, le graal chez les illustrateurs, décerné chaque année par la Society of Illustrators depuis 1902.

Une ascension qui atteint son pic en 2009 lorsque Guy Billout réalise la couverture du prestigieux magazine The New Yorker. Il y représente le président américain Barack Obama, dans une longue marche solitaire vers la Maison Blanche, essayant de réunifier Démocrates et Républicains.

Couverture du magazine "The New Yorker" réalisée par Guy Billout, on voit Obama marcher vers la Maison Blanche, dans la neige. Il y a des couleurs rouge et bleu qui l'entourent
Couverture du magazine “The New Yorker” réalisée par Guy Billout

Dans l’esthétisme des œuvres de Guy Billout, on peut voir du Hiroshi Nagai, un peintre japonais amoureux des paysages californiens, qui utilise une approche des couleurs et de la perspective similaire. Dans l’humour et l’absurdité des situations crées par Guy Billout, on peut distinguer du Igor Morski, artiste polonais, qui lui aussi surprend par ses œuvres surréalistes.

Impossible de savoir si ces deux artistes, issus de la fin du XXe comme Guy Billout, ont été inspirés par le français. En tout cas, une chose est sûre, comme l’ensemble des gens confrontés à ses œuvres, ils n’ont pas pu rester indifférents face au travail surprenant du natif de la petite commune de Decize.

Pour apprécier le travail de Guy Billout, découvrez son portfolio.

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Thomas Dagnas
Article écrit par :
Etudiant Grand amoureux de musique et de culture, je traite des sujets qui touchent aux variantes du rap et du RnB, mais aussi à la culture graphique.

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