TOP 10 des séries ayant marqué l’histoire de la télévision

Image d'avatar de Arthur TongletArthur Tonglet - Le 10 juin 2024

À travers ce diptyque d’articles sur les séries les plus marquantes de la télévision et du streaming, Beware vous propose une sélection de productions aux thématiques diverses et de tous horizons, ayant marqué l’histoire du petit écran.

Dans ce premier article, nous dresserons une liste non exhaustive des séries télévisuelles ayant bousculé les standards de leur médium, de par leurs partis pris formels, sociales ou politiques.

Vous pouvez dès à présent lire notre second article sur le top 10 des séries connues et méconnues à voir.

Twin Peaks

Quand on parle de shows télévisés, impossible de passer au-dessus de Twin Peaks. Après une première saison diffusée en 1990 sur la chaîne américaine ABC, la série de Mark Frost et David Lynch connaît un succès plus mitigé pour sa deuxième saison. En cause, la révélation du meurtrier de Laura Palmer, exposé au public bien trop tôt, suite aux pressions de la chaîne sur les scénaristes pour conclure l’arc narratif principal. Après l’annulation du show, Lynch réalisera un film en 1992 (Twin Peaks : Fire Walk with Me) avant de revenir plus de vingt ans plus tard, avec un troisième chapitre, Twin Peaks : The Return. Dès les premiers épisodes, la série marque une rupture avec les programmes télévisés conventionnels, en empruntant aux codes du cinéma (dilatation du temps et séquences contemplatives, présence d’une véritable « patte » d’auteur, importance de la bande originale) et une certaine appétence pour la bizarrerie et les espaces liminaux. De l’esthétique très Lynchéenne, on retiendra la Loge Noire, un goût prononcé pour le café et les tartes aux cerises, ainsi qu’une saison 3 d’anthologie, dont un épisode entier dédié à un essai nucléaire dans un noir et blanc somptueux.

The Wire

The Wire ou Sur écoute pour la version française, est une plongée dans les quartiers pauvres de la ville de Baltimore et du trafic de stupéfiants. Sorte de tableau généralisé de cette ville de l’État du Maryland, la série suit le parcours de policiers, mais également de trafiquants de drogues, de politiciens et de journalistes. Librement inspiré de l’expérience d’Ed Burns, ancien officier de la brigade criminelle de Baltimore, puis professeur en école publique, et du travail d’investigation de David Simon (chacun coauteur de la série), ce show en cinq saisons explore les thématiques sociopolitiques profondes des États-Unis du début des années 2000. Connu pour son rejet du manichéisme et un panel de personnages étendu à tous les degrés de l’échelle sociale, la série s’est également distinguée de par son imprévisibilité, n’hésitant pas à provoquer la mort de personnages centraux tout le long du show. Forte d’une grande disparité dans ses rôles, cette production HBO a permis à des acteurs alors inconnus à l’époque de faire ensuite carrière à Hollywood (Dominic West, Idris Elba et Michael B. Jordan, entre autres).

Game of Thrones

Si l’on devait décerner ici le titre de la série contemporaine la plus populaire, il reviendrait certainement au Trône de Fer. À travers pas moins de 8 saisons, diffusées entre avril 2011 et mai 2019 sur HBO, cette saga médiévale de dark fantasy a fait les grandes heures de la chaîne américaine, rassemblant au fil des épisodes un public toujours plus nombreux et de tous horizons. Loin des images d’Épinal d’un moyen âge souvent lissé par les productions hollywoodiennes, l’univers de la série se veut à la fois réaliste et fantastique, et présente des personnages tout en aspérité, dont les besoins oscillent entre pulsion de chair et nécessité de verser le sang pour asseoir leur suprématie sur les maisons adverses. Cette production, dont le budget des premières saisons est relativement restreint pour les besoins de la série (environ 5 à 6 millions de dollars par épisodes), obtiendra ensuite les bonnes grâces de la chaîne, et terminera son intrigue en apothéose, avec une enveloppe de 15 millions par épisodes. Des chiffres qui méritent d’être mentionnés ici, car si l’intrigue de la série est très centrée sur les dialogues et les enjeux géopolitiques lors des premières saisons, elle se perd selon nous dans son dénouement, à travers une débauche d’effets visuels, qui se fait aux dépens de la finesse d’écriture à laquelle nous avaient pourtant habitués les showrunners (David Benioff et D.B Weiss). Ajouté à cela le fait que les scénaristes s’éloignent de la trame des romans à partir de la sixième saison (George R.R. Martin n’ayant tout simplement pas encore achevé son œuvre), et l’histoire prend une tournure de plus en plus expéditive. À ce titre, la saison 8 décevra à bien des égards de nombreux fans, et une pétition sera mise en ligne pour réclamer la réécriture de ce dénouement tant attendu. Mais peut-être que le voyage importe plus que la destination ?

Les Soprano

Diffusée sur HBO (toujours les mêmes) entre 1999 et 2007, la série de David Chase raconte les tribulations du mafieux Tony Soprano, qui tente de concilier vie de famille et organisation criminelle, alors qu’il souffre de crise de panique due au stress de ses différentes responsabilités. Portée par une distribution majoritairement Italo-Américaine, ainsi que par la prestation de James Gandolfini en patriarche tantôt attachant ou impitoyable, ce show de 86 épisodes est la série câblée ayant connu le plus grand succès financier de l’histoire de la télévision. S’il reconnaît s’être inspiré du film Les Affranchis de Martin Scorsese, Chase n’emprunte pas moins des chemins différents dans son écriture, en abordant notamment son personnage principal sous l’angle de la thérapie avec une psychiatre. La relation entre le médecin et son patient, au profil moral douteux, est au cœur de l’histoire, et des séquences de rêves ubuesques terminent de brosser le portrait de l’une des figures télévisuelles les plus iconiques des années 2000. Symptomatique des changements de mœurs au sein de la société américaine de ce début de siècle, la dualité intérieure qui anime Tony est propice à des scènes à la fois drôles et dramatiques, dans lesquelles ce chef de famille aux valeurs conservatrices ne sait plus comment se comporter. On retrouvera James Gandolfini au côté de Brad Pitt dans Cogan : Killing Them Softly (2012), ainsi que dans Quand vient la Nuit (sorti en 2014) avec Tom Hardy, son dernier film en tant qu’acteur, avant sa mort prématurée en 2013 d’une crise cardiaque, à 51 ans.

Six Feet Under

Faisant partie de la triade dorée de la programmation HBO du début des années 2000, Six Feet Under suit le quotidien de la famille Fisher, dont le père dirige une société de pompes funèbres. À la mort de ce dernier, ses deux fils, pourtant peu enclin à reprendre l’entreprise familiale, vont se résoudre à prendre la tête de ce business singulier. Naturellement porté sur la finitude de la vie humaine, et sur la manière dont les travailleurs mortuaires gèrent ces questionnements, que ce soient dans leur vie professionnelle ou privée, ce portrait d’une famille de croque-morts aux problématiques variées (santé mentale, homosexualité, devoir envers la famille) est d’une humanité troublante. Alan Ball, le créateur de la série, a lui-même déclaré dans une interview qu’il voulait montrer que la mort peut survenir de manière tout à fait chaotique, sans attendre des proches du défunt qu’ils aient le temps pour faire le tri dans leur vie. Si le show est une belle allégorie de cette idée, son humour noir, ses comédiens, et sa bande originale ont également grandement participé au succès de la série. On y retrouve notamment Michael C. Hall (Dexter) dans un des rôles principaux, et Thomas Newman à la musique, qui avait déjà collaboré avec Ball sur le film American Beauty, alors scénariste sur le projet. On notera également un dénouement réputé pour être l’une des plus belles conclusions de série de tous les temps.

Breaking Bad

Avec son pitch dont l’efficacité rendrait jaloux n’importe quel élève d’école de cinéma, le show de Vince Gilligan a connu un succès planétaire depuis sa première diffusion en 2008 sur la chaîne AMC. Distribué ensuite sur Netflix, son personnage principal, Walter White, est très vite devenu une icône de la Pop Culture, relançant la carrière de Bryan Cranston, le bien-aimé paternel de l’adolescent Malcolm dans la série éponyme. Dans un rôle à contre-courant de ses débuts de comédien, l’acteur incarne un professeur de chimie atteint de cancer, qui pour assurer une pérennité financière à sa famille, décide de se lancer dans le traffic de méthamphétamine. Avec l’aide de son associé et ancien élève Jesse Pinkman, il va connaître, du fait de ses connaissances scientifiques poussées, une ascension fulgurante, et se confronter à des chefs de gangs peu scrupuleux. Gilligan admet avoir voulu montrer comment un homme ordinaire et attachant pouvait passer de protagoniste à antagoniste principal d’une série, de par une succession de choix motivés par la survie et un danger imminent. À travers le parcours de Walter, c’est tout le système de couverture médicale aux Etats-Unis qui est critiqué ici, et la manière dont les middle class américaines doivent parfois se débattre pour survivre au sein d’une société profondément individualiste.

Chernobyl

Sorti en 2019 sur HBO, et ayant très vite bénéficié d’un succès critique et public retentissant, cette mini-série de cinq épisodes retrace les évènements ayant conduit à la catastrophe de la centrale de Tchernobyl en 1986, ainsi que sa gestion par les autorités soviétiques de l’époque (l’URSS n’étant alors pas encore dissoute). Avec sa photographie sobre et son ton profondément nihiliste, cette création de Craig Mazin n’est pas sans dénoter avec les travaux précédents de son auteur (Scary Movie ou la trilogie Very Bad Trip). Portés par un trio d’acteurs tous plus convaincants les uns que les autres, on retrouve Jared Harris, en scientifique et membre de l’équipe ayant géré la catastrophe de Tchernobyl, Stellan Skarsgård, en politicien chargé par le Kremlin de diriger la commission gouvernementale après l’explosion, et Emily Watson, qui joue également une scientifique à la recherche de ce qui s’est réellement passé durant l’incident. Avec ce récit parfaitement ciselé et dont le propos est plus que jamais d’actualité, Mazin démontre l’impuissance et le manque de moyen d’un modèle soviétique vieillissant, qui malgré les efforts menés par les gens de terrain, ne cessera de vouloir étouffer l’affaire, par peur de passer pour faible aux yeux de ses adversaires. Suite à la diffusion de la série, certains médias russes proches du gouvernement déclareront même vouloir produire leur propre adaptation des faits, pour contrecarrer cette vision trop caricaturale selon eux.

Utopia

Cette série britannique de Denis Kelly est certainement l’une des plus cryptiques de ce classement. À mi chemin entre le thriller et l’humour noir, l’histoire se déroule dans un univers conspirationniste, où les tensions géopolitiques sont accrues. À travers ces deux saisons (arrêté ensuite pour cause d’audimat insuffisant), Kelly dépeint les possibles dérives du néolibéralisme, dans un monde où les multinationales se disputent le pouvoir sur les populations du monde entier, quitte à semer les graines d’épidémies futures, dans le but de capitaliser sur les vaccins et d’amoindrir la fertilité. Avec ces scènes parfois choquantes, et qui vont bien au-delà des limites morales établies au cinéma ou à la télévision, le show marque également par ses couleurs vives et une musique électronique oppressante. Comme un miroir pas si déformant que ça, cette vision du monde d’après résonne aujourd’hui avec une véracité troublante (la série date de 2014). Insolente et provocatrice, la série fait preuve d’une grande intelligence à l’égard des thématiques qu’elle aborde, et le discours politique qu’elle propose est d’une pertinence rare. En somme, une œuvre osée et jusqu’auboutiste, comme rarement vu sur le petit écran, et dont l’existence même relève d’un petit miracle (on peut remercier la chaîne anglaise Channel 4).

Oz

Diffusée à une époque pourtant dominée par les sitcoms, Oz dépeint un univers carcéral  ultra-violent et réaliste. Première série produite par HBO, le show de Tom Fontana a ouvert la voie à des productions tout aussi matures telles que Les Soprano ou The Wire. Chaque épisode s’ouvre sur le discours apparemment anecdotique d’un détenu au ton sarcastique, mais dont les thématiques feront écho aux évènements qui auront lieu ensuite. Durant chacun d’eux, on suit plusieurs intrigues entremêlées au sein de la prison de haute sécurité de Oswald State Correctionnel Facility (surnommée Oz), et qui se recoupent parfois entre elles. Dénuée de héros et de personnages principaux, le concept de cette production très audacieuse pour l’époque consiste à voir évoluer des criminels de tous bords, dans un environnement qui ne fait pas état de l’individu, et où les perspectives de survie sont fortement compromises par le climat de violence ambiant. Les gangs, la drogue, l’homosexualité et la réinsertion des prisonniers font partie des nombreuses problématiques soulevées par le récit, qui dénonce la misère sociale et les conditions de vie déplorables des détenus dans les prisons américaines.

La Quatrième Dimension

Créée par Rod Sterling et diffusée pour la première fois en 1959, cette série d’anthologie est souvent considérée comme l’un des plus beaux exemples de créativité de la télévision américaine. Le ton de la série, plutôt subversif pour l’époque, propose une réflexion propre à chaque épisode. Les situations que traversent les personnages se situent la plupart du temps dans une dimension parallèle, qui ressemble en de nombreux points à la nôtre, à l’exception de quelques facteurs précis, qui font basculer la réalité des personnages dans la fantasmagorie ou la science-fiction. À l’origine, le terme Twilight Zone est utilisé par l’armée américaine, pour désigner l’instant précis où un avion est incapable de voir la ligne d’horizon, alors qu’il est en phase d’atterrissage. Et dans le générique de la série, l’expression est utilisée pour imager la frontière entre science et superstition, ainsi que la dimension apportée par l’imagination pour combler ce vide. Chaque épisode, d’environ 25 minutes, propose une nouvelle histoire originale, et un concept qui lui est propre. Les discours du narrateur Rod Sterling en voix off, l’atmosphère mystérieuse de la série, ainsi que son esthétique visuelle, propre à l’Amérique des années 50, ont fait de cette production peu ordinaire une référence incontournable de la Pop Culture.

Retrouvez bientôt un nouveau TOP 10, dans la suite de notre diptyque consacré aux meilleures séries.

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Arthur Tonglet
Article écrit par :
Curieux de l'art sous toutes ses formes, je travaille dans l'audiovisuel et je fais en parallèle de la musique sous le pseudo "O'Bear". J'aime venir ici pour mettre en avant les artistes que j'aime, pas toujours connus à leur juste valeur 🙂

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