Si le terme “lithographie” ne vous dit rien, vous avez pourtant déjà vu plusieurs lithographies au cours de votre vie, c’est certain ! Beware vous a concocté une petite rétrospective de cette technique artistique.
Sommaire
La lithographie, qu’est-ce que c’est ?
La lithographie est une technique d’impression qui consiste à créer ou à reproduire un dessin ou un tracé en plusieurs exemplaires. Du grec lithos (=pierre) et graphein (= écrire), la lithographie nécessite l’utilisation d’une encre spéciale particulièrement grasse ou d’un crayon gras. Le tracé en question se réalise sur une pierre calcaire et plus spécifiquement sur une pierre lithographique. Cette technique repose sur le principe de répulsion entre l’eau et les matières grasses.
Inventée en 1796 par Aloys Senefelder, cette technique permet de réaliser de multiples copies d’illustrations qui ont été dessinées à la main. C’est à l’ère industrielle que la lithographie connaît son heure de gloire et en grande partie grâce à la caricature anti-monarchiste. Cet art, dans un premier temps réservé aux classes populaires, était une forme de résistance et de rébellion car il permettait de produire des caricatures du roi rapidement et à moindre coût. La lithographie est restée, pendant une longue période, associée dans les esprits à la satire et à l’imagerie populaire.
Puis, les débuts de la mécanisation et de l’organisation de la production ont ouvert un champ des possibles considérable ! L’avènement de la société de consommation et de la publicité a également boosté l’utilisation de la lithographie. En effet, c’est à cette période que le format de l’affiche publicitaire apparaît et se répand, offrant à la lithographie un vaste marché. L’application de la lithographie à l’affiche marquera l’étape la plus importante de son histoire, même si dans les années 1830-1860, son utilisation reste limitée à l’affiche de librairie.
Nombreux sont les artistes qui se sont intéressés et qui ont exploité cette technique au cours de leur vie. On peut citer – entre autres – Jean-Jacques Grandville, Auguste Raffet, Tony Johannot ou Victor Hugo et Balzac. Plus récemment encore, on pense à Pablo Picasso, Paul Klee ou Marc Chagall.
Cet art graphique s’est popularisé en France au début du 19ème siècle et est fortement inspiré de la gravure. Le but de la lithographie est de développer, à moindre coût, les œuvres des artistes. À la fin du 19ème siècle un véritable marché de la lithographie se développe et de plus en plus de collectionneurs se révèlent.
La lithographie a également servi à imprimer des timbres en grande quantité lors des crises économiques. On pense à la fin du 19ème siècle et plus spécifiquement à 1870, lors de la Guerre franco-allemande. Paris était alors assiégée par les troupes allemandes et la production de timbres avait été transférée à des artisans lithographes situés à Bordeaux. Il aura fallu peu de temps avant que des faussaires ne s’inspirent de cette technique pour produire de faux timbres à leur compte.
La BNF propose des recherches et études intéressantes au sujet de la lithographie, on vous les conseille !
Le principe de la lithographie
Le principe de la lithographie est relativement simple. La lithographie nécessite une pierre mais pas n’importe quelle pierre : une pierre de calcaire. Ce type de pierre lithographique se caractérise par sa dureté et sa très grande porosité qui lui permet d’absorber facilement l’eau. La pierre doit être en parfait état afin de minimiser le risque de casse et la surface doit être la plus lisse possible. La pierre en question doit être d’une épaisseur d’au moins 6 cm.
Comme mentionné plus haut, la lithographie repose sur un principe chimique : la répulsion du gras et de l’eau. L’artiste se munit de son encre et dessine sur la surface avec des crayons en graisse ou en résine. Petit point chimie : rappelez-vous que l’eau et les substances grasses / huileuses sont composées d’éléments qui se repoussent par nature. Si vous tentez de mélanger de l’huile d’olive et de l’eau, vous remarquerez que ces deux liquides ne fusionnent pas, ils se sépareront automatiquement. Ainsi, lors du tirage lithographique, la pierre est constamment mouillée, ce qui permet aux parties dessinées essentiellement grasses de refuser l’eau et d’accepter seulement l’encre qui est grasse. Ainsi, lorsque les rouleaux s’écrasent sur la pierre, seule l’encre est absorbée par les dessins.
La pierre est ensuite saupoudrée de talc et humidifiée avec une solution d’acide acétique et de gomme arabique. L’acide acétique aide à faire ressortir l’image, tandis que la gomme arabique augmente la résistance de la pierre aux substances grasses. La plaque est ensuite lavée et, lorsqu’elle est encore humide, elle est encrée au rouleau. Une feuille de papier est alors placée sur la plaque et pressée, de sorte que le dessin y soit transféré, produisant la première impression lithographique, avec des lignes très claires et précises.
Ce processus peut être répété encore et encore, même des centaines de fois, en encrant et en humidifiant la même plaque.
En quoi la lithographie se démarque des autres formes d’art ?
La lithographie est souvent associée à la gravure / lithogravure. Contrairement à la lithographie dont le support et le résultat sont lisses, une gravure est en relief et nécessite parfois l’utilisation d’un moule. De manière générale, le principe de la gravure fait référence à toutes les techniques artisanales ou modernes qui utilisent l’incision ou le creusement pour produire une image, un texte ou toute autre inscription dans la matière.
Bien que différentes, ces techniques permettent toutes deux une reproduction en plusieurs dizaines d’exemplaires. Il n’y a pas de limitation de tirage au stricto sensu mais l’artiste lui-même a tout intérêt à limiter son tirage afin de rendre ses réalisations plus rares et précieuses.
Bon à savoir : il existe aussi la lithographie d’interprétation – dans quel cas l’artiste n’intervient pas dans le processus mais c’est un autre artiste qui reproduit l’œuvre. Cette technique n’est pas considérée comme une copie car la technique est la même. Néanmoins, certains imitateurs vendent leur lithographie d’interprétation des fortunes alors que rien ne vaut la main authentique du dessinateur original.
Il est également utile de savoir reconnaître une véritable lithographie d’une pâle copie ou d’un simple dessin. Voici quelques conseils :
- Une lithographie a un léger grain irrégulier.
- L’encre est particulièrement épaisse.
- Le papier est fabriqué en pur chiffon.
Lorsque la mention « EA » (Épreuve d’Artiste) est inscrite sur la lithographie, c’est que cette dernière est la propriété de l’artiste lui-même. C’est donc lui qui peut décider de la garder ou de la vendre. Cette mention est un gage de plus-value et d’authenticité pour les lithographies qui en sont dotées.
En outre, les lithographies modernes sont signées et numérotées. Par exemple, si vous détenez une lithographie sur laquelle est indiqué “18/30” c’est que l’artiste en a réalisé 30 exemplaires. Les artistes signent parfois leurs œuvres directement sur la pierre mais d’autres le font sur les reproductions.
Que vaut la lithographie sur le marché de l’Art ?
Si cette forme d’Art n’intéresse peut-être pas le plus grand nombre, il peut être bon de savoir qu’une lithographie a une certaine valeur sur le marché de l’Art. Certaines œuvres peuvent même être très intéressantes !
En réalité, la valeur d’une lithographie dépend de la rareté du tirage, de la qualité du tirage, mais également de sa signature et de sa numérotation. L’avantage des lithographies, c’est qu’elles restent accessibles auprès du grand public, contrairement aux peintures de certains artistes peintres ou sculpteurs.
Les lithographies se vendent en moyenne entre 100€ et 300€ mais d’autres sont plus recherchées et peuvent donc être vendues entre 800€ et 2500€ – celles de Serge Poliakoff par exemple. D’autres encore passent la barre des 10.000€ mais on fait référence ici aux lithographies de Pablo Picasso, Henri Matisse ou Marc Chagall.
A présent, il est important de différencier la lithographie de la sérigraphie. Souvent confondues, la lithographie et la sérigraphie sont pourtant différentes de par les techniques qui sont employées et leur résultat. La lithographie nécessite une pierre, de la graisse, une presse et des encres à base d’huile alors que la sérigraphie nécessitera plutôt un écran tendu sur cadre, une raclette et des encres à base d’eau ou de solvant.
Les maîtres de la sérigraphie restent à ce jour Andy Warhol, Roy Lichtenstein ou encore Henri Matisse.
La lithographie de nos jours…
La pierre en calcaire a longtemps été utilisée par les artistes. Néanmoins, cette pierre est particulièrement lourde et fragile. A présent, on se tourne davantage vers des plaques de zinc et d’aluminium et on parle dans ce cas de zincographie ou d’algraphie.
De nos jours, la lithographie n’est plus essentiellement en noir et blanc mais bien en couleurs. Depuis plusieurs siècles d’ailleurs, les lithographies colorées fleurissent ici et là mais elles sont surtout répandues depuis les dernières décennies. On parle de “chromolithographie“. Néanmoins, les lithographies comportant de la couleur prennent plus de temps et nécessitent plus de rigueur qu’une lithographie en noir et blanc. En effet, la technique traditionnelle consistait à utiliser plusieurs pierres lithographiques, une pour chaque couleur. Selon le nombre de couleurs présentes, les chromolithographies peuvent nécessiter des mois de travail et seront donc plus chères que les lithographies à encre noire. On attribue la création de la chromolithographie au français Christophe Engelmann.
Certains d’entre vous ont probablement entendu parler de “microlithographie“. A en méprendre les plus candides, ce terme ne désigne pas des lithographies dans un format miniature. Néanmoins, l’idée n’est pas si éloignée ! En effet, la microlithographie fait écho à quelque chose d’extrêmement petit. D’après le dictionnaire Larousse, la microlithographie désigne “une technique de fabrication de circuits intégrés par gravure à l’échelle du micromètre”. Mais ce concept est avant tout un concept en technologie et n’a pas vraiment de lien avec la lithographie sur le plan artistique.
Aujourd’hui, on emploie le terme “lithographie” pour désigner le procédé d’impression de manière générale – même si le support varie entre la pierre, le métal ou encore le bois. A vrai dire, bon nombre d’artistes utilisent encore aujourd’hui la lithographie, et on observe même un certain engouement pour cette technique qui reste abordable et pratique. Les réalisations pullulent sur Instagram et il est difficile de sélectionner seulement quelques comptes. Donc si cet art vous intéresse, n’hésitez pas à taper #lithographie / #lithography pour retrouver les créations de centaines d’artistes à travers le monde.
On vous conseille également notre article sur l’imprimante 3D afin de vous intéresser à d’autres techniques d’impression.