Diffusé lors de l’édition 2022 du Super Bowl (l’un des évènements sportifs les plus suivis aux Etats-Unis et dans le Monde), et publié cette nuit sur les internets, le premier teaser de la série librement adaptée du Silmarillion est enfin là. Si les réactions dubitatives ne cessent de pleuvoir tant du côté des internautes que de la presse, chez Beware!, on préfère se prémunir de poser un jugement « trop hâtif ». Mais quand même…
« One Ring to rule them all, one Ring to find them,
One Ring to bring them all and in the darkness bind them »
Le Seigneur des Anneaux – J.R.R. Tolkien (1954)
Une oeuvre convoitée tel l’Unique
C’est en novembre 2017 (près de 3 ans après la sortie du dernier volet du Hobbit) que le public apprend l’acquisition des droits de l’oeuvre de J.R.R Tolkien par la firme de Jeff Bezos. Longuement convoités par Netflix, HBO et même Apple, c’est finalement sur Prime Video (la plateforme de streaming d’Amazon) que l’on pourra retrouver l’univers qui avait conquis les lecteurs de l’écrivain britannique, puis les spectateurs de la trilogie multi-pluri oscarisée (attention on ne rigole pas avec ça) de Peter Jackson. Mais Sabre de bois Sam Gamegie (on préfère citer Gandalf que Jeff Bezos), qu’est ce qui a bien pu faire pencher la balance envers ce géant de la commande à distance et des colissimos ?
D’après ce que nous savons (et on ne sait pas tout qu’on se le dise), la décision du Tolkien Estate (la structure juridique qui s’occupe des ayants droits de la Terre du Milieu) et HarperCollins (l’éditeur des oeuvres littéraires de ce bon vieux John Ronald Reul) s’est principalement jouée lors des discussions avec la directrice des programmes de Prime Vidéo : Sharon Tel Yaguado, qui a fait preuve lors des négociations d’une connaissance quasi encyclopédique de l’univers en question. Et comme un dernier coup de marteau sur l’enclume , le fait que l’entreprise soit également l’un des plus gros vendeurs de livres au monde, aurait fortement enthousiasmé les ayant droits (qui empochaient au passage un chèque de 250 millions de dollars).
« Le rideau de pluie grisâtre de ce monde s’ouvrira et tout sera brillant comme l’argent. Alors, vous les verrez. »
5 ans après, un premier teaser et une date de sortie
Si le teaser sorti cette nuit ne laisse entrevoir que très peu d’informations sur la trame de la série, on sait néanmoins que les cinq saisons annoncées dépeindront la création des anneaux de pouvoir, l’ascension de Sauron en tant qu’antagoniste principal des peuples libres (elfes, hommes, nains et autres braves comparses de guerroyades). On retrouvera donc Elrond, Galadriel (et peut-être même Gandalf), mais surtout, tout un panel de nouveaux personnages dévoilés dans un article pour Vanity Fair, et créés de toutes pièces pour la série (en fin de compte, le show se base surtout sur des évènements évoqués dans le Silmarillion). Les showrunners J.D Payne et Patrick Mackay, qui collaborent ensemble depuis près de vingt ans, et à qui l’on doit tout un tas de film de commandes, dont on ne citera pas le nom pour ne pas vous faire peur (Jungle Cruise…oups) ont bénéficié d’un budget des plus conséquents (200 millions de dollars par saison, et au moins 1 milliard pour toute la série). Une clause rassurante pour les amateurs de batailles épiques et de créatures en CGI, mais qui risque, au même titre que des super-productions tels que Marvel ou Star Wars, de faire pencher la balance vers le conformisme le plus total. Car comme l’annonce déjà le teaser, l’esthétique se veut lécher, et les minois quelque peu standardisés des personnages s’éloignent grandement des visages durcis par la peine et les batailles que décrivaient Tolkien dans son oeuvre.
Quant aux paysages, ils semblent s’être dangereusement numérisés, et les cités des hommes, des elfes et des nains dont le réalisme troublant venait renforcer l’immersion dans l’univers des films de Jackson (les effets spéciaux de l’époque alliaient la texture des maquettes élaborées avec soin par les équipes de Weta Workshop, au proportions épiques apportées par les images de synthèse de Weta Digital) semblent s’être mué en décors factice et sans relief.
But you are only quite a little fellow in a wide world after all!
Bilbo le Hobbit – J.R.R Tolkien (1937)
Si l’on pouvait s’attendre à ce qu’une production de cette envergure ne fasse pas dans la demi-mesure et adopte le formatage des blockbusters de notre époque, on peut également se garder de poser trop rapidement un constat ou de perdre foi face à un tel déluge d’effets visuels. Si le cachet esthétique de ce teaser n’a pas le grain et la noirceur visuelle des films qui ont popularisé cet univers aux yeux du grand public, il semble que la logique d’Amazon soit avant tout de miser sur l’étalage du budget alloué à la série, en alignant les money shots (plans impactant censés marquer l’esprit du spectateur et tournés la plupart du temps en priorité dans la chronologie du tournage), sur fond de musiques ultras épiques et de tirades vibrantes d’émotion. Surement auront nous droit à d’autres trailers d’ici la diffusion du show sur la plateforme (le 2 septembre 2022), avec on l’espère, plus d’informations sur l’histoire, les personnages et finalement, sur l’aspect humain de cette épopée. Car c’est bien là toute le propos de l’oeuvre originale, le récit de quatre jeunes hobbits aux préoccupations bien ordinaires, qui s’engagent dans un conflit démesuré, et qui déjouent avec courage les ambitions dévorantes des forces du Mal. Un équilibre subtile entre luttes intimistes et conflits guerriers d’ampleur, qu’avait su trouver le cinéaste néo-zélandais en 2001, tout en poésie, et en rendant grâce à l’univers si riche et plein de vie de la Terre du Milieu.
1 commentaire
DocV
Très bonne critique, j’aimerai beaucoup bénéficier d’un stage à vos côtés ArthurT.