Passionné d’histoire, notamment des anciennes civilisations, Matthew Craven s’inspire des œuvres créées par les anciennes éthnies pour créer des collages hors du temps. Né dans le Michigan, il vit aujourd’hui en Californie après avoir obtenu un diplôme d’art en 2010 à l’école des Arts Visuels de New York (MFA). C’est durant ces études qu’il découvre la technique du collage, en dessinant par-dessus de vieilles illustrations, il est fasciné par les vieilles photos de l’Ouest américain. Son travail s’éloigne de la hiérarchie des arts, mais cela ne l’empêche pas d’être reconnu et d’exposer un peu partout comme à la David Shelton Gallery à Houston, le DKCT Contempory de New York, le 101 /Exhibit de Los Angeles.
L’art de la récupération
Chaque œuvre passe par un même processus, Matthew Craven part tout d’abord à la recherche de vieux livres d’histoires. Il fouille les sous-sols des librairies, des bibliothèques locales et des réserves d’écoles pour récupérer ces vieux ouvrages d’éducation qui ont peu à peu laissé place aux objets numériques. En parcourant les pages, il laisse son imagination se confronter aux différents motifs et sculptures qui se présentent à lui. Lorsqu’il découvre des objets qu’y l’animent, il recherche alors des similitudes en partant d’une base de formes qui se répètent. Les images qu’il choisit font partie d’un éventail de lieux, de périodes et de cultures.
Redonner vie aux vestiges
En sélectionnant des images dans des vieux livres, Matthew Craven souhaite redonner vie aux vieilles œuvres d’art. Il entretient un rapport délicat au temps, réintroduire ces vestiges archéologiques dans une œuvre contemporaine détruit la frontière du temps qui les sépare de nous. Les œuvres dans ce processus redeviennent des objets qui font partie de notre histoire. Il utilise d’ailleurs le dos des vieilles affiches de cinéma pour concocter ses collages. Les marques d’usure comme les taches, la saleté ou encore les résidus de ruban adhésif, qu’il laisse apparentes, nous font prendre conscience du temps. Ce support est à la fois fragile et tenace, abimé mais ayant traversé les décennies.
Alors que l’art devient de plus en plus numérique, notamment celui du collage, il tente de s’en éloigner pour être toujours en contact direct avec sa création. Chacune des pièces qu’il découpe des manuels a été faite à la main, la continuité de ce processus est une manière d’honorer les différentes cultures. Il laisse même sur ses œuvres les traits des dessins et les papiers découpés pour que l’on ressente la présence du toucher. Matthew Craven par ses collages essaie de réintroduire son spectateur à un processus de création important, qui part de l’antiquité jusqu’à ses expositions.
Une même Histoire
Lorsqu’il décide d’introduire des sculptures ou des motifs de différentes cultures, cet artiste choisit spécifiquement des éléments ayant des similitudes entre eux. Le but est de trouver un moyen de mélanger et d’associer les cultures et les époques. Ces combinaisons produisent des amalgames à partir de points communs qui ont existé entre les sociétés. Le message essentiel de son art est de montrer que nous sommes tous pareils, il veut réunir l’humanité, qui s’est disloquée, sous une même histoire, similaire pour tous. En effaçant leurs particularités, les modèles des différentes cultures se reflètent plus qu’ils ne s’opposent.
S’éloigner des récits traditionnels
Matthew Craven rejette les récits sur l’Histoire, son travail reconfigure ces récits historiques traditionnels en s’inspirant de formes obsessionnelles du passé. Lorsqu’il travaille les pages des vieux manuels, il supprime les textes qu’il trouve erronés, trop subjectifs. Les images seules doivent exister, elles seules ne mentent pas. C’est une manière de se positionner contre l’impérialisme occidental qui a façonné nos visions et nos récits. L’absence de contexte et d’explication libère l’objet de toute interprétation biaisée et elle rompt les préjugés de notre éducation. Il demande à son spectateur de se pencher sur la façon dont il construit du sens et des croyances.
“Tous ces récits centrés sur l’Occident : presque tous les livres d’histoire anglais imprimés dans les années 60, 70 et 80 proviennent d’un seul fabricant à Londres. Ce sont eux qui écrivent l’histoire, et nous l’observons tous comme une vérité, et cela a fait partie du travail.”
Matthew Craven
Cette histoire non-linéaire des croyances doit permettre au spectateur de laisser libre cours à son imagination. Tandis que certains verront les vestiges d’un peuple d’Asie, d’autres y verront la culture aborigène, tel est le vrai objectif du travail de Matthew Craven. Comme les spectateurs, les images sont autonomes entre elles et l’art, ici, parle de lui-même. Le public doit s’efforcer de réfléchir, en partant de ce qu’on connait, on doit se demander pourquoi certaines choses ne nous sont pas familières. Les œuvres se lient en fonction des associations du spectateur et de sa compréhension subjective, qu’il puise d’une base culturelle ancrée dans sa psyché. Cet art n’est pas qu’une esthétique, il s’agit d’une expérience existentielle profonde.
Vous pouvez suivre le travail de Matthew Craven sur son compte Instagram.