Après avoir suivi les cours de la Royal Academy of Fine Arts à la Haye, la photographe s’installe à Amsterdam et débute ses premières séries. Beaucoup d’aliments, des formes immobiles, comme suspendues, des teints vifs: voilà en quelques mots les bases de sa photographie. Son travail sur les fruits et légumes évoque de manière triviale une esthétique foodporn assez particulière, parfois très froide…Les couleurs tout droit sorties d’un album d’image cisaillent des photos à la symétrie plus ou moins désorganisée. Une lumière crue éclaire des sujets inanimés, désincarnés et pourtant plein de vie: Hillebrandt s’amuse de symboles phalliques et références à notre culture sexuelle. La pornographie est d’ailleurs un des thèmes auxquels elles s’intéresse; certaines de ses photos ayant été créées tout spécialement pour illustrer des articles sur le sujet.
Son univers est à la fois aseptisé et très joueur, à travers la réinvention constante d’objets du communs, sorte d’archétypes de la banalité: la brique de lait, la canette, une plante verte. Elle même décrit son travail comme une approche de la quotidienneté, de l’habitude et de l’ennui. Une réflexion sur la consommation émerge de son oeuvre, en particulier des codes formels qui rappellent le marketing, la photographie publicitaire. Via ses natures mortes (des tableaux rangés, ennuyeux et fascinants), Hillebrandt entend ainsi questionner les limites de la liberté permise par le confort matériel de nos vies.
Si elle expose beaucoup aux Pays Bas, Lauren Hillebrandt n’est pas inconnue en France: sa série Flat Landscapes fut exposée en 2013 au festival parisien Photo off. Représentée par la gallerie suédoise Tryffelgrisen, elle a également présenté ses oeuvres à New York ainsi qu’en Grande Bretagne.
Allez à l’occasion faire un tour sur site qui regorge de trouvailles: l’artiste y poste entre autres choses des collages élaborés sur le moment et inspirés de son quotidien, mais aussi des quelques dessins. Par leurs traits maladroits ceux-ci rappellent les oeuvres du dessinateur pour enfants Quentin Blake: tout en finesse.
C’est donc un univers complet -visuellement simple mais qui ne manque pas d’interpeller- que la photographe développe au fil de ses travaux, et qu’on attend encore de découvrir dans une exposition plus complète.