[Interview] Kendal, virtuose du néo Italo-Disco

Image d'avatar de François GrazFrançois Graz - Le 23 août 2022

Haute-Savoie, 2h00 du matin. Face à une horde de festivaliers déchainés et avides d’Italo-Disco, Kendal s’apprête à démarrer son set, niché dans la forteresse imprenable qu’est Château Sonic. Le climax est tel, qu’il n’a rien à envier aux meilleures œuvres d’Argento.

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©Technobeton

L’âge d’or du giallo justement, constitue l’une des principales sources d’inspiration du DJ toulousain, dont l’EP Inferno n’est pas sans rappeler le film éponyme du cinéaste italien.

Tantôt cavalier seul, tantôt derrière les platines avec son acolyte Pablo Bozzi pour le projet Infravision, Kendal chapeaute depuis l’aube 2020 Ritmo Fatale, label qui fleure bon l’antipasti cofondé avec Paul Guglielmi. Afin d’en apprendre davantage sur cet alchimiste sonore dopé aux bandes sons rétro-futuristes, Beware! s’est invité au donjon pour une session interview.

Beware : Salut Kendal, pour commencer, vaste question : quelle est ta définition de l’Italo-Disco ?

Kendal : « Eighties, couché de soleil, synthé, espace, Ferrari, toison apparente…ça c’est pour les mots clés. L’Italo-Disco est quelque chose de cyclique, depuis quelques temps il y’a un véritable revival de ce genre. Dès les premières notes, on est transporté dans les années 80, période où la vision du futur était perçue comme utopique. En 2022 le fameux futur est davantage anxiogène, à la limite de la dystopie. Pour résumer, l’Italo-Disco c’est un peu l’antidote de l’époque actuelle. »

B : J’ai cru comprendre que cela faisait longtemps que tu étais dans le milieu électro, en atteste une interview de toi par Nova qui date de plus de 10 ans…

K : « Oui elle commence à dater cette interview ! Depuis que je suis gamin j’ai toujours été fasciné par la musique électronique. Daft Punk, les premiers David Guetta puis Ed Banger, Institubes, j’ai tout poncé. On parle d’une époque sans Spotify ou Youtube, on découvrait la musique sur Radio FG, dans les CD inclus avec le magazine Trax, sur le site Beatport ou même via des forums. Il y’a 15 ans je me suis mis sur le logiciel Ableton et j’ai commencé à faire du son. Par la suite j’ai emménagé dans un petit bled du sud nommé Oloron-Sainte-Marie. Il se passait davantage de choses niveau scène musicale à Pau, c’est d’ailleurs là que j’ai rencontré mon pote Lou, avec qui j’ai formé le groupe Ultraviolence pendant nos années lycée.

Le premier son qu’on a fait était une reprise du morceau éponyme tiré du film Orange Mécanique de Kubrick et les productions suivantes étaient déjà bien influencées 80s. Je me souviens que l’interview Nova était juste avant notre tout premier live, aux Nuits Zébrées de Pau. Il y a 14 ans, du coup, ça passe vite.  Après la période Ultraviolence, j’ai diggé la techno, les Boiler Room, les sons de Détroit/Chicago, je faisais mon éducation musicale tout en étant en quête de ma propre identité en tant que DJ et producteur, mais je finissais toujours par revenir à mes premiers amours 80s. Lorsque David Vunk m’a repéré via ma démo italo Ultimo et qu’il m’a proposé de sortir mon premier EP en vinyle sur son label, ça a été le déclic pour assumer pleinement cette identité musicale, d’où le nom Manifesto pour cette première release. »

B : En deux ans d’existence, quel bilan fais-tu du label Ritmo Fatale ?

K : « On a lancé ça en janvier 2020, mon EP chez David Vunk étant à peine sorti. Le but avec Ritmo Fatale, c’était de ramener une vibe Italo à Toulouse via l’organisation de soirées. L’organisme s’est transformé en label suite à l’arrivée de la covid qui a tout chamboulé. Le processus créatif a été très empirique, on a poussé l’identité visuelle au maximum.

En parallèle, Brice Couder a lancé l’organisme de distribution Underscope dédié aux micro-labels et il nous a contacté pour savoir si nous étions intéressés. Grâce à cette initiative, on s’est réellement structurés, et on a pu proposer nos tracks sur Spotify. Avec Paul mon associé de longue date, on fait tout ensemble à 200% au sein du label. La découverte musicale, c’est ce qui nous anime. Lors de nos appels à démo, qu’importe le nombre de followers de l’artiste, ce qui nous importe, c’est le son qu’il propose. Moi qui aime bien avoir plusieurs casquettes et pas seulement mixer, un label, c’est le médium parfait pour ça. »

B : J’aimerais qu’on parle de la D.A de Ritmo Fatale, reconnaissable au premier coup de mirette.  

K : « On passe beaucoup de temps avec Paul sur Instagram à dénicher des visuels. Notre operatus mundi consiste à sélectionner une œuvre qui colle avec un de nos sons et demander à l’artiste si on peut le créditer, plutôt que mandater un graphiste pour concevoir un design. Les trois quarts des releases ont résulté de ce procédé. Après, il existe des exceptions, comme Vica Pacheco qui a conçu la cover de Neuroticker ou encore Viktor H pour Le Martinet. Je trouve ça très important d’avoir un super visuel pour accompagner une track, quelque part, il va sublimer le morceau. »

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©Technobeton

B : Féru de ciné vintage, quelles sont tes affiches de film favorites ?

K : « Il m’arrive de passer des heures à digger des affiches de cinéma polonaises. En fait, les artistes recréent les covers iconiques des années 80 à leur sauce et visuellement ça déboite ! Sinon plus récemment l’affiche en hommage au giallo de L’étrange couleur des larmes de ton corps m’a bien plu. »

B : À l’avenir composer une musique de film/série, c’est quelque chose qui te tenterait ?

K : « C’est quelque chose qui me ferait kiffer ouais. Associer la musique à l’image, c’est élémentaire. J’ai eu la chance de voir ma track Intacto figurer sur le soundtrack de la nouvelle série de Joseph Gordon Levitt, Mr Corman, j’étais comme un dingue quand j’ai appris ça.

Quand je compose, j’imagine toujours à quoi pourrait ressembler le clip de mon morceau. Faire un album concept, le clipper et réaliser toute la direction artistique du projet, ce serait également grandiose. »

B : Des récents coups de cœur ciné ?

K : « J’ai été voir le dernier Park Chan-wook, Decision To Leave. C’est du porno pour les yeux quoi ! Le montage, la construction…c’est à la fois hyper complexe et tellement simple. »

B : C’est quoi la suite en 2022 ?

K : « En Mars prochain mon second EP Inferno fêtera ses trois ans…alors je bosse activement sur son successeur et je planche sur l’élaboration d’un live d’une heure. Tu peux ajouter trois tracks chez Dischi Autunno, le label de Jennifer Cardini, ainsi qu’un single Infravision à venir prochainement.

Enfin, une collab’ Ritmo Fatale avec Slow Motion, label basé à Berlin fondé par les italiens Franz Scala et Fabrizio Mammarella est prévue. Nos univers matchent bien, alors on va réunir 5 artistes de chez nous et 5 de chez eux. Un programme plus que chargé en somme ! »

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François Graz
Article écrit par :
Oiseau de nuit accessoirement journaliste free-lance.

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