Énigmatiques et enivrantes, les créations visuelles d’Etienne Dufresne nous amènent à revisiter des lieux cachés et banals à l’aide d’une touche de poésie bien dosée. Des personnages bleus aux portraits de musiciens montréalais, rencontre avec un artiste qui déconstruit le réel pour mieux s’imprégner de son étrangeté.
L’artiste aime se situer tout juste à la limite entre la réalité et le chimérique lorsqu’il imagine une nouvelle mise en scène. Il a d’ailleurs inventé un mot parfait pour ça : “strangélique”. « C’est un mélange d’étrange et de psychédélique en fait, explique-t-il. Je trouve que ça représente bien mon style, assez près de la réalité mais un peu épeurant. »
En effet, c’est en allant chercher les couleurs naturelles dans le paysage et le ciel, et en les rehaussant, qu’un effet surréel se dégage de ses photos. Même si Etienne photographie des humains, la plupart du temps, tout part d’une certaine attirance pour un lieu : le toit d’une église, un coin de jardin ou encore une ruelle insignifiante au premier regard.
L’illustration comme inspiration
Cet amour pour les assemblages insolites lui vient de son admiration pour le dessin et les bandes dessinées. « J’aurais aimé ça en fait être illustrateur et faire de la BD, confie-t-il. Lorsque je revisite mes vieilles BD, je vois tous ces personnages avec des peaux en couleurs et ça m’interpelle vraiment. »
Car la signature particulière de l’artiste se situe dans le choix d’un bleu vif pour colorer ses sujets dans l’une de ses séries. « Le bleu parce que c’est l’opposé du rouge, je trouve que c’est une couleur intéressante et que ça créé un effet « alien », s’amuse-t-il. J’en ai essayées plusieurs et le bleu reste la couleur la plus satisfaisante à regarder. »
D’ailleurs, Etienne Dufresne aime se définir d’avantage comme étant un artiste visuel plutôt qu’un photographe, même si l’utilisation de sa caméra demeure la première étape vers la création de ses oeuvres. « Je me considère comme un créateur d’images, analyse-t-il. Il y a tellement de transformations qui se font aujourd’hui sur les photos, donc finalement, c’est quoi la différence entre ça et l’illustration ? »
Du bleu, mais pas que
Le jeune homme collabore également avec des musiciens afin de réaliser leurs portraits. C’est avec Marc-André Vidal et les artistes Pénélope et Chloë qu’il a travaillé afin de donner vie au très audacieux visuel de la chanteuse Klô Pelgag, accompagnée de sa grande cage thoracique, qui ressemble curieusement à un bout de squelette tout droit sorti d’un dessin-animé.
Héléna Deland et Mélanie Venditti, entre autres, sont également passé devant l’objectif de l’artiste. Il admet à ce propos choisir avec soin les musiciens qu’il photographie. « J’aime bonifier des artistes en qui je crois beaucoup, ça ne fonctionne juste pas si je n’aime pas les artistes, il faut que leur musique m’inspire », révèle-t-il.
Toutefois, dans le portfolio de ce créateur prolifique, on retrouve tout autant de clichés d’endroits vides qu’il aime revisiter à travers son filtre énigmatique, que de portraits croqués sur le vif et de mises en scène curieusement insaisissables.
L’adepte du « strangélisme » refuse ainsi de s’imposer toutes limites de style et continue de créer des images « qui fonctionnent bien », pour le plus grand plaisir de nos yeux.
Il expose présentement sa série des « Dames en bleu » au café Névé sur la rue Rachel.
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