“A toutes les femmes qu’on aime”
A travers son travail, Charlotte rend hommage. A chaque étape de sa jeune, mais pourtant déjà grande carrière, elle a rendu hommage…
A ses amies lycéennes, comme Claire Laffut qu’elle considère aujourd’hui comme sa muse la plus forte, qui lui insufflent l’inspiration pour ses premières photos. A Angèle qu’elle magnifie dans ses deux premiers clips «La Loi de Murphy» et «Je Veux Tes Yeux». A toutes les femmes dans son clip «les Passantes» de Georges Brassens qu’elle réalise en 2018. Et même… à leurs poitrines (avec son projet «The Real Boobs» exposé en 2015 lors de la Nuit de l’Année des Rencontres d’Arles), à leur plaisir sexuel (avec sa série de photos «Find your clitoris»), à leurs corps tout entier (à travers sa collaboration «Les enveloppes» avec son amie maquilleuse Ophélie Secq).
Toutes ces choses que la société nous incite à cacher , parce que « Oh non c’est tellement obscène », « Voyons, ça ne se fait pas! », « C’est personnel, on ne parle pas de ça en public » … Toutes ces phrases toutes faites, ces tabous inventés de toute pièce, Charlotte a fait le choix courageux d’en faire le sujet principal de ses créations.
Elle le dit elle-même, “Il est important de parler de ces choses là car c’est un sujet qui doit être connu pour qu’il puisse exister, tout simplement.”
Délicatement provocatrice, elle explore le langage corporel avec pour objectif de raconter l’humain de façon poétique et de tuer les stéréotypes avec humour. Son approche surréaliste, sa quête pour l’improbabilité et l’absurde permet d’inscrire son travail dans une dynamique positive, peu importe le sujet abordé. Chacune de ses expériences, bonnes ou mauvaises, Charlotte les transforme en une source de création et d’énergie inépuisable remplie d’espoir et d’optimisme. La mise en scène de Maurice, son papa, «petit bonhomme un peu spécial», lunaire et plein de fantaisie, parti sur une planète lointaine, en est l’illustration parfaite.
Maurice, mon père, mon héros.
En 2011 on lui diagnostique un cancer, puis à la suite d’une opération il tombe dans un coma et n’en ressortira qu’un mois plus tard avec de nombreuses séquelles neurologiques. Alors que les médecins le pensent à tout jamais perdu dans un monde parallèle, l’inexplicable se pro- duit, il se relève doucement et reprend goût à la vie. Spectatrice de cette renaissance inespérée, Charlotte décide alors d’entamer un travail de longue haleine pendant sept années.
Le Projet Maurice est lancé officiellement en 2016 via Kickstarter, où 777 contributeurs lui donneront vie et permettront à la photographe belge de sortir le 3 novembre 2018 son premier livre «Maurice, Tristesse et rigolade». Pour la petite anecdote, c’est Maurice lui même qui a trouvé le titre, alors ne lui faites pas croire qu’il a perdu la tête! Devant l’objectif, ce père Professeur de physiopathologie à l’Université de Bruxelles, se mue avec un naturel déconcertant en icône surréaliste des temps modernes. Le livre, édité par le célèbre magazine Fisheye, est pensé comme un conte métaphorique sept tableaux mettant en scène Maurice : le coma, la chambre, la désorientation, le langage, le royaume, l’entretien surréaliste, le prochain monde.
En 2017, le projet remporte la Mention Spéciale aux Photo Folio Review Awards des Rencontres d’Arles, avant même la sortie du livre. Reconnaissante de ce témoignage de respect par la profession, pour Charlotte toute cette aventure va bien au-delà. Ca n’est plus simplement son œil de photographe dont il est question, mais celui de la jeune fille qui, par besoin vital, a voulu rendre hommage à ce père qu’elle a connu, à lui redonner vie et à apprendre à mieux connaître le nouveau.
Pour toujours, garder son âme d’enfant.
Le regard enfantin de cette petite fille de 7 ans qui prend ses premières photos à l’aide d’un appareil jetable, Charlotte le célèbre dans plusieurs de ses compositions. En 2017 elle livre pour l’éditorial du Citizen Magazine deux séries de photos inspirées, pour l’une, du célèbre livre de Saint Exupéry «Le Petit Prince», et pour l’autre, du récit de Maurice Sedak «Max et les Mini- monstres».
Même lorsqu’elle aborde les thèmes de la vieillesse ou du temps qui passe, cette vision espiègle de l’humain, bien loin du cliché de la solitude et de la tristesse, ne la quitte pas. En 2014 elle met littéralement à nue Claudette 75 ans devant l’objectif et prouve que la beauté est intemporelle, que le corps n’est qu’une enveloppe. En 2015 c’est au tour de «Françoise & Françoise» de montrer que la modernité et le dynamisme n’est pas qu’une question d’âge. L’amour lui aussi garde toute sa magie qu’on ait 7 ou 77 ans, c’est ce que Charlotte révèle dans la Campagne 2017 pour les eaux de Cologne MARCEL & MARCELLE de Marie-Jeanne Grasse.
“Tout le monde il veut seulement la fame”, mais pas Charlotte Abramow.
Elle collabore à plusieurs reprises avec des marques, notamment dans le milieu de la mode, comme avec DA/DA sur leurs lookbooks de 2017 et 2018.
Sa notoriété prend d’ailleurs forme grâce à ses édito pour Elle Belgique, avant de remporter le Prix Picto de la Jeune Photographie de Mode en 2014 avec sa série «Sleeping Beauties». Plus récemment, Claudie Pierlot lui fait confiance pour sa collection capsule «Turn up the Volume» développée avec la chanteuse Juliette Armanet. Et cette année c’est Nike qui lui confie sa Campagne pour la Air Max Dia. Rien que ça… En 2018 elle enchaîne les couvertures de magazines notamment avec Angèle et Elvis Roméo dans les Inrocks, et en ce début d’année pour Télérama.
Pourtant toute cette effervescence autour de la jeune belge ne lui fait pas tourner la tête. La photographie est surtout pour elle le moyen de rencontrer des personnes vraies, de partager des moments sincères avec de parfaits inconnus, de mieux comprendre l’autre. C’est dans cette logique que prend forme son projet «They love trampoline» en 2017 sur les terres insulaires et surréalistes des Iles Féroés. Ses portraits absurdes nous questionnent avec humour sur le futur de ces populations isolées, mais également sur les conséquences du réchauffement climatique et de la montée des eaux.
Charlotte a bien les pieds sur terre, qu’on se le dise, mais cela ne l’empêche pas de garder la tête tout là-haut dans les nuages. Le rêve, le sommeil et l’inconscient font partie de ses thématiques de prédilection et elle ne s’en cache pas. En 2016 elle met en scène l’humoriste Norman Thavaud dans une série mémorable inspirée de ses insomnies, où le jeune homme déambule dans les rues de Paris accompagné d’un mouton… Oui vous avez bien lu, un mouton… Insensé me direz-vous!
Après tout pas tant que ça, surtout lorsqu’on sait que le premier geste de la photographe au réveil est de vérifier qu’elle est bien sortie de son rêve et de retour dans la réalité. Mais tout compte fait, à quoi bon? Bienvenu dans les rêves éveillés de Charlotte Abramow.
Pour acheter le livre “Maurice, Tristesse et Rigolade”, c’est par ici!
2 commentaires
Gigi
Dope ?