Bratislava abrite Z Tapes, label de musique lo-fi sur cassettes

Image d'avatar de Eric RktnEric Rktn - Le 6 juin 2016

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Quand on cherche des groupes excitants dont on souhaite parler sur Beware, il n’est jamais rare que l’on se retrouve dans des coins du monde improbables, comme en Slovaquie. On y est tombé sur un groupe que l’on aimait bien, aux sonorités lo-fi à la Mac Demarco, puis un autre qui sonnait comme Daniel Johnston, puis on s’est finalement aperçu qu’ils sortaient tous de Z Tapes, et sa tête pensante: Filip Zemčik, dénicheur indie et fétichiste de la cassette.

BEWARE: Avant de parler concrètement de Z Tapes, je voulais en savoir plus sur toi Filip, tu as toujours habité à Bratislava?

FILIP: En fait, j’ai grandi dans un petit village à côté de Bratislava avec mes trois frères et soeurs. Maintenant j’habite la capitale, et j’y travaille.

B: C’est quoi tes premiers souvenirs avec les cassettes?

F: J’ai toujours eu un rapport particulier avec la musique, quand j’étais enfant je me souviens que j’écoutais The Offspring et Bloodhound Gang sur cassettes, dans les années 90.

Plus tard, j’ai tenu un blog pendant plus de cinq ans (start-track.com), ce blog est devenu le label Z Tapes. Les cassettes sont devenues mon plus gros hobby, que ce soit pendant une pause café ou mes voyages, j’ai souvent un 35 mm avec moi.

B: Je me demandais, est-ce qu’il y a une scène musicale particulière à Bratislava?

F: Pas vraiment, Enfin, peut être qu’il y en avait une petite il y a quelques années. Aujourd’hui il y a juste beaucoup de groupes dans beaucoup de styles, et des producteurs de musique électronique, mais je n’écoute pas du tout de musique slovaque. Ce n’est pas vraiment mon truc, mais si tu devais en écouter, je te conseillerais Queer Jane, Elections in Deaftown ou des producteurs comme Foolk ou Whithe qui valent le coup. On est en train de voir comment collaborer ensemble dans le futur. J’espère un jour être fier de dire que la scène de Bratislava est cool et que j’en fait partie. Un jour peut être.

B: Qu’est ce qui a fait que tu as transformé ton blog en label ?

F: Je suivais beaucoup de labels comme Crash Symbols, Spirit Cat Tapes et Orchid Tapes. J’aimais beaucoup ce qu’ils faisaient et j’ai simplement voulu faire la même chose. Les cassettes étaient le support que je voulais utiliser.

B: c’est ironique pour un blog né dans internet de partir sur un support comme ça, c’était par nostalgie ou raisons économiques ?

F: J’adore ce support, ça ne coûte pas cher, c’est petit, ça a l’air super cool. Les cassettes ont un truc en plus. Les vinyls sont bien aussi, mais trop chers pour moi. J’aime bien l’idée qu’une cassette puisse devenir un objet de collection, et puis c’est aussi une niche où il est super facile de naviguer. J’aime aussi le fait que les cassettes ne soient pas éternelles, qu’elles peuvent casser facilement. C’est juste fascinant.

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B: J’ai toujours associé les cassettes avec la musique lo-fi, et le style de Z Tapes est plutôt parfait pour ce genre.

F: Oui, j’ai toujours aimé la “bedroom pop” et le lo-fi, et j’ai toujours voulu faire des sorties dans ce genre. Jusqu’à maintenant, c’est le style dominant sur Z Tapes, mais j’espère élargir notre catalogue à d’autres styles, comme la musique électronique que j’aime tout autant.

B: J’ai du mal à imaginer d’autres styles sur ce support en fait

F: On peut tout sortir sur cassettes, peu importe le genre, même si c’est vrai que certains sont mieux que d’autres pour ce support, surtout le lo-fi. Mais honnêtement peu importe, il y a tellement de musique électronique qui sort sur cassettes. Mais ce sont des mondes différents.

B: Ça fait combien d’artistes sortis depuis le lancement ? Je n’ai pas pu les compter tellement il y en a, mais j’ai vu qu’il y avait un groupe parisien

F: Oui, c’est In Love With a Ghost avec Mael Madec, un producteur super talentueux, j’aime bien son côté chill, et “let’s go” est une de mes sorties préférées.

F: J’ai lancé Z Tapes il y a 3 ans, le 11 novembre exactement. Jusqu’à maintenant on a 32 sorties, mais le nombre d’artistes découverts se compte en centaines. Cependant je ne sors pas tous les artistes pour qui j’ai un coup de coeur, la plupart des artistes que je sors sont tout petits avec des toutes petites fan base. J’aime bien ces artistes discrets, il y a une sorte de beauté dedans.

B: Les artistes que tu sors viennent de partout dans le monde, comment tu les trouves ?

F: La plupart du temps via Bandcamp, mais maintenant beaucoup grâce à mes amis et les blogs. Je reçois beaucoup de demandes aussi, mais tout ne me plaît pas forcément, j’ai besoin de vraiment apprécier la musique pour pouvoir la défendre.

B: Tu as pu tous les rencontrer en face à face ?

F: J’en connais certains personnellement, mais pas tous. Dans la plupart des cas, ça se passe beaucoup par internet, mais on a organisé une rencontre ensemble à Londres avec plusieurs d’entre eux bientôt, et je suis super pressé d’y être.

B: Qui était le premier artiste pour qui tu as eu le déclic “mince il faut absolument qu’on sorte ta musique sur cassette”?

F: Je pense que c’était pour Euphoria Again, on était terriblement excités. Il n’était pas connu à l’époque, j’imagine que quand je lui ai proposé une sortie en physique ça lui a tout de suite plu. Je suis super fier de être sortie, “Bedroom Recordings” a eu de bons retours, tout le monde était à fond dedans. J’aime toujours autant sa musique, c’est un projet génial et j’ai hâte qu’on sorte plus de musique d’eux, cet automne avec un peu de chance.

B: J’ai vu aussi que tu avais sorti une compilation caritative, où tous les fonds étaient reversés aux victimes de violences domestiques, Z Tapes a une utilité sociale aussi ?

F: La compilation caritative était ma façon de rendre quelque chose aux gens, à la société. Je connaissais les gens qui défendaient cette cause et j’ai voulu y apporter ma contribution à ma manière, comme je n’ai pas toujours le temps de faire du volontariat. Il y a beaucoup de causes qui me sont chères et je voudrais utiliser Z Tapes comme un support pour les gens qui en ont plus besoin que moi. Après, Z Tapes est aussi là pour aider les musiciens autant que possible, et si je choisis des petits groupes c’est parce que je peux leur être vraiment utile. C’est très important pour moi, je pense que c’est ça le fond de ce label.

B: Des groupes sont devenus très connus depuis que tu les as sortis ?

F: Pas vraiment, même si Euphoria Again est bien plus connu qu’à ses débuts. D’une certaine manière ils gagnent tous en popularité après leur sortie chez nous, et ça me fait plaisir de voir ça. J’aimerais pouvoir donner plus et développer mieux leur fan base. Mais je suppose que ça demande surtout du temps et de la patience.

B: A côté de Z Tapes, tu as créé aussi United Cassettes, qu’est ce que c’est ?

F: C’est une plate forme de cassettes. J’ai lancé ça l’été dernier quand j’ai senti que le support cassettes méritait plus d’attention. On a donc créé une carte des labels qui utilisent ce support, et elle en compte aujourd’hui plus de 150 actifs aujourd’hui. On y fait des critiques de sorties, des interviews et des premières, c’est maintenant géré par Mia, la meilleure boss qu’on puisse avoir. On compte y faire beaucoup plus de choses, je m’occupe de la distribution de cassettes en Europe, on pense aussi créer un vlog. Mais cela reste un hobby, donc ça prend du temps à se développer.

B: Avec tous ces groupes étrangers à gérer, et finalement peu slovaques, tu as déjà pensé à déménager ?

F: J’ai pensé bouger aux États Unis ou au Canada, mais j’aurais besoin d’un visa. J’ai vécu pendant un moment à Londres mais c’était une très mauvaise expérience. Ma fiancée et moi avons un travail ici, et tout va bien. On a pensé à déménager tellement de fois, mais l’endroit idéal n’existe pas, on est heureux ici.

B: Qu’est ce que tu aimerais que Z Tapes devienne dans le futur? Une major mais que pour les cassettes ?

F: Je n’aime pas les majors. Ma copine m’a demandé aujourd’hui si je souhaitais que Z Tapes devienne mon job à plein temps et que je puisse en vivre. J’ai dit non, c’est mon hobbie, ma plus grande passion et je veux que ça le reste. Peut être qu’un jour on deviendra le plus gros label cassette, qui sait. Je veux juste sortir la musique que j’aime, et il y en a tellement ! Tout est une question de patience, mais je suis optimiste pour le futur. La cassette à un bel avenir.

B: On part bientôt en festivals en voiture, tu nous conseilles quoi pour la route ?

F: Je pense que la meilleure musique pour voyager est Fog Lake. Je ne sais pas pourquoi, mais j’aime beaucoup ce groupe. Après ça dépend, si c’est l’été, écoute plutôt Skating ou Fox Academy.

Z Tapes sur Bandcamp
United Cassettes Website

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Eric Rktn
Article écrit par :
Poète en freelance, papa de Le Noeud Pap' Magazine. Twitter / Instagram: @eric_rktn

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