L’artiste américaine Karen Ann Myers nous confronte au voyeur confortablement installé en chacun de nous. Cette irrésistible envie de sonder le mystère des alcôves et débusquer ces filles que l’on imagine en pleine rêverie, tournant mollement les pages d’un magazine aux pages cornées.
Dans sa biographie, on apprend que l’objectif de Myers reste d’interroger la complexité psychologique des femmes, en s’inspirant du culte de la beauté en cours dans les médias de masse. C’est donc par de somptueuses peintures alliant la finesse du trait au réalisme photographique qu’elle rend enfin accessible notre inavouable curiosité. Sauf que….
Sauf que, dans ses œuvres, les naïades, lascives, n’en gardent pas moins un œil inquisiteur braqué vers l’objectif. Vêtues du strict nécessaire que la latitude de liberté de la chambre (ou le cabinet médical) autorise, des sentiments mêlés de vulnérabilité et de détermination inébranlable se détachent des scènes.
Une atmosphère soyeuse enveloppe les regards, soutenus par de riches motifs et rais de lumière ingénieusement disposés, de sorte à soutenir moues songeuses et peaux diaphanes. Les courbures se détachent soudain du cadre, laissant place à l’exploration de la psyché féminine et à une douce langueur érotique.
Faisant de ces figures féminines les seules maîtres des lieux, et nous, spectateurs déjà énamourés, de simples visiteurs tolérés, Karen Ann Myers elle-même estime que ces chambres n’en forment, en réalité, qu’une seule, la sienne.
Pleinement sensuelles sans user des ressorts classiques de la culture mainstream, ces filles en fleurs là se sont libérés des carcans du féminin tout-consommable : tourne-disque, smartphone, de bons gros bouquins et une belle confiance en soi. Le kit mains-libres de la femme moderne, en somme.
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