Saviez-vous que Ralph Angus McQuarrie a survécu à un coup de feu à la tête durant la guerre de Corée, en 53 ?
L’information n’est pas essentielle pour la bonne compréhension de son œuvre, car elle n’aborde pratiquement jamais ce traumatisme, mais lorsqu’on se mange une balle dans le crâne sans en subir des séquelles, on gagne le droit d’être introduit ainsi ; pour l’éternité.
Ralph Angus McQuarrie est un illustrateur américain né en 1928, dans la ville de Gary (Useless fact, Michael Jackson y est né ). Il a étudié a The Art Center School à Los Angeles, et s’est fait la main dans l’illustration d’équipement dentaire, puis, pour Boeing, dans l’aéronautique. Sa véritable carrière ne débutera toutefois qu’en 1975 lorsque Georges Lucas l’engage pour illustrer plusieurs scènes du script de son troisième film : Stars Wars. Et affirmer que Macquarie eut une importance fondamentale dans l’esthétique globale du projet est un doux euphémisme. À son crédit, peuvent être retenus les designs définitifs de C3PO, R2-D2 et Dark Vador, mais, plus pompeusement, l’esthétisme général de tout l’univers Stars Wars. La géométrie si particulière des décors et la sobriété des couleurs lui sont dues, et l’on serait même en droit de lui attribuer la paternité du style used future, univers futuriste en phase de déclin, qu’on retrouvera quelques années plus tard dans l’esthétisme du Nostromo, vaisseau du premier Alien. Christian Blauvet de Entertainment Weekly dit de son travail :
« Le design de McQuarrie pour Stars Wars ressemble à du Salvator Dali s’il avait illustré Flash Gordon pour Universal en 1963 à la manière du grand ouest de Sergio Leone. »
Or, le nom de Ralph Angus McQuarrie vous a été jusque là inconnu.
Car tout ça, voyez-vous, c’est un problème de jaquette. C’est une question de place. Une fois les acteurs placés, bien en gros, puis le nom du réal et quelques effets, l’espace est limité, et il faut attendre le générique final pour avoir une présentation plus exacte des auteurs. D’ordinaire, le système fonctionne, car il existe certains films portés par un homme unique, polyvalent, touche à tout et ambitieux, ou par un binôme entre chef opérateur et réalisateur, mais la première trilogie Stars Wars n’est définitivement pas de ceux-là.
Le succès et l’indéniable qualité de la trilogie sont le résultat d’une somme de talents multiples. John Williams fait partie de ses quelques individus qui ont su se démarquer, mais tant demeurent encore dans l’ombre. Les maquettes de Colin Cantwell ont été oscarisées, les effets spéciaux de John Dykstra ont été jugés par Roger Ebert encore meilleur que ceux de 2001 l’odyssée de l’espace, le design sonore de Ben Burtt est responsable des sons emblématiques des lightsabers et des droïdes, puis John Mollo qui a dessiné les costumes Jedis, et les maquillages de Stuart Freeborn. Lucas a su bien s’entourer ; c’est indéniable.
Ces noms exigeraient d’être d’autant plus célébrés, tant l’esthétisme de Stars Wars, à l’encontre de sa narration majoritairement basée sur les films de Kurosawa, est unique et a inspiré à elle seul des générations entières d’artistes Peut-être plus que par son propos, son thème ou sa morale, c’est par sa direction artistique que Stars Wars s’est inscrit en notre rétine et devenu l’oeuvre intemporelle qu’elle est aujourd’hui.
Mais de tout ça, s’il vous faut retenir qu’une seule chose : Ralph Angus Macquarie a survécu à une balle dans la tête. Une balle. Dans la tête.