Emma Steinkraus

Emma Steinkraus, artiste engagée avec les femmes artistes-naturalistes du XIXe siècle

Image d'avatar de Louise WagonLouise Wagon - Le 16 mars 2023

Une jeune artiste basée en Virginie exposée à la 1969 Gallery pour la seconde fois rend hommage aux femmes artistes-naturalistes du XIXe siècle et à l’art du genre non-humain.

Emma Steinkraus, une artiste qui rend hommage à l’histoire naturelle dans son art

Artiste visuelle, professeure de beaux-arts, rédactrice fondatrice de Company Editions, une revue de poésie et d’arts contemporains, Emma Steinkraus étudie par son œuvre la pertinence contemporaine de l’art du XIXe siècle au travers d’illustrations botaniques et d’histoire naturelle.

Élevée par des scientifiques dans les Ozarks de l’Arkansas – entomologiste pour son père et botaniste amateur pour sa mère – Emma Steinkraus a grandi en gardant des insectes, en identifiant des plantes et en cultivant des habitats dans les prairies. Ces petites créatures ont rythmé sa vie enfantine et ponctué sa vie d’observations minutieuses de serpents observés, de papillons contemplés ou de mites aperçues. 

Peinture d'Emma Steinkraus - papillon d'érable rose sur un cornichon.
Illustration d'un papillon par Emma Steinkraus

Ces premières expériences se manifestent aujourd’hui par un engagement à explorer les façons complexes dont l’écologie, la société et l’histoire personnelle se tissent ensemble. Prêter attention aux autres organismes est une habitude profondément enracinée qu’elle a voulu refléter dans ses peintures. A sa façon, Emma Steinkraus rend alors hommage à la biodiversité trop souvent maltraitée par les Hommes et délaissée dans l’art.

Peinture d'Emma Steinkraus - oiseau bleu avec une fraise dans le bec.
Illustration d'un insecte par Emma Steinkraus

Ainsi, dans son exposition Impossible Garden de 2021 à la 1969 Gallery, Emma Steinkraus encourage à repenser les illustrations botaniques et d’histoire naturelle en les contextualisant dans les domaines de la biographie, du discours féministe, de l’histoire sociale, du colonialisme et de l’environnementalisme. Chacune de ses œuvres est le fruit de nombreuses recherches alliant poésie et botanique, comme peut le faire Carmel Seymour dont nous avons déjà parlé.

Emma Steinkraus, une artiste qui rend hommage aux femmes artistes-naturalistes oubliées du XIXe siècle

Blessée par la marginalisation historique des femmes artistes et contre les inégalités entre les sexes qui persistent dans le monde de l’art, frappée par l’injustice des hiérarchies occidentales entre le XVIIe et le XIXe siècles où les femmes et les paysages, peintures animalières et natures mortes semblent être relégués en bas de l’échelle, Emma Steinkraus a décidé de consacrer son imagination à cette cause en remodelant les genres associés à des versions de l’histoire de l’art qui excluaient les femmes.

Illustration par Emma Steinkraus
Emma Steinkraus, Pink Caiman (After Maria Sibyla Merian), huile sur toile et photo, 2021, 122×91 cm
Illustration par Emma Steinkraus
Emma Steinkraus, Evil Pioneer, huile sur toile et photos, 2021, 41×51 cm

Entre peintures de portait et peintures narratives, la peintre fait souvent référence aux poses trouvées dans les peintures d’histoire européennes de scènes religieuses ou mythologiques, avec pour fond des plantes et des animaux aux couleurs pastel, dans une tentative d’aplatir les hiérarchies.

« Pour moi, vivre dans une société qui dévalorise l’art fait par les femmes et l’art sur la nature non-humaine est intimement lié au sexisme et aux crises environnementales en cours qui ont un impact sur ma vie, c’est-à-dire que je le prends personnellement » explique-t-elle dans un entretien avec Carey Gibbons et Allan McLeod.

De lacune en lacune, au fur et à mesure que le projet se développait donnant naissance à Impossible Garden, les recherches d’Emma Steinkraus l’ont poussée à passer par d’autres chemins allant de la Tasmanie à l’organisation abolitionniste à Philadelphie dans les années 1830.

Ainsi, Emma Steinkraus met en lumière des femmes fortes, mais oubliées comme Louisa Aktinson qui a choqué ses contemporains en transformant ses jupes en pantalons ou encore l’artiste militante Sarah Mapps Douglass qui a fondé la Female Anti-Slavery Association, une école pour filles noires, une bibliothèque sociale, un foyer qui s’occupe des personnes âgées et qui a organisé une série de conférences médicales qui ont aidé la femme à reprendre le contrôle sur leur santé et leur vie reproductive.

Peinture d'Emma Steinkraus
Emma Steinkraus, Daisy Chain (for Sarah Mapps Douglass, Amy Matilda Cassey, & Mathilda Arabella Evans), huile, 24x30in (60x76cm), 2021

Dans son exposition de janvier 2022 à la 1969 Gallery, Emma Steinkraus répond à nouveau à ces problématiques qui lui sont chères. Cette fois-ci, elle s’est penchée un peu plus précisément sur les femmes artistes-naturalistes travaillant en 1900. Ainsi, dans Empty Nest (pour Gennie & Virginia Jones), l’artiste s’inspire de Geneviève Estelle Jones surnommée autrefois “L’autre Audubon” parce qu’elle a initié la création d’un énorme guide illustré du XIXe siècle sur les nids d’oiseaux nord-américains dans les années 1870.

Dans un travail intelligent et subtil, Emma Steinkraus apporte des recherches dans ses peintures en ajoutant des images trouvées qu’elle ajoute sur ses œuvres comme des notes de bas de pages visuelles. Dans Empty Nest, la veste est recouverte de transferts liés aux oiseaux. Ils relient des images d’archives de l’époque de Jones – comme des photos de la destruction de forêts anciennes – aux catastrophes environnementales contemporaines.

Peinture d'Emma Steinkraus
Emma Steinkraus, Empty Nest (for Gennie & Virginia Jones), pastel et acrylique, 24x18in (60x45cm), 2022
menagerie Emma Steinkraus
happy animals
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Louise Wagon
Article écrit par :
Actuellement étudiante en Droit du patrimoine culturel, je contribue en tant que rédactrice à deux publications spécialisées dans l'art contemporain : Beware ! Magazine et Art Mag.

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